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Daniel Gérard nous dit comment créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux
Daniel Gérard est un horticulteur passionné par les plantes et les oiseaux.
Source : « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux »
Introduction
Les parcs urbains et les jardins occupent en France métropolitaine une superficie totale de plus d’un million d’hectares, soit nettement plus que celle protégée par les réserves. Ces espaces verts aménagés jouent, ou en tout cas peuvent jouer, un rôle important pour la conservation de la faune et de la flore. Ils peuvent servir de corridors reliant des zones naturelles et/ou de refuges. Pour qu’ils puissent remplir ces fonctions, on peut suivre des principes simples, comme renoncer à l’usage de pesticides, planter des arbres et des arbustes fournissant le gîte et le couvert à de nombreux animaux, opter pour une taille raisonnée ou laisser des zones, même petites, non tondues.
Il existe déjà de nombreux sites web, forums et ouvrages donnant des conseils pour faire de son jardin un petit paradis pour les oiseaux, mais ils négligent parfois l’importance de la valeur ornementale. Dans son guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux », Daniel Gérard, paysagiste et ornithologue, aborde simplement les différents moyens de répondre aux besoins fondamentaux d’une avifaune variée tout en tenant compte des questions esthétiques.
Après une présentation générale de cet ouvrage, nous vous proposons une interview de son auteur, qui nous donne des conseils pratiques pour renaturer ou améliorer la capacité d’accueil de son jardin.
Abstract
Urban parks and gardens occupy a total area of over one million hectares in metropolitan France, significantly more than the area protected by nature reserves. These landscaped green spaces play, or at least can play, an important role in the conservation of flora and fauna. They can serve as corridors connecting natural areas and/or as refuges. To ensure they fulfill these functions, simple principles can be followed, such as avoiding the use of pesticides, planting trees and shrubs that provide shelter and food for numerous animals, opting for responsible pruning, and leaving even small areas unmowed.
There are already numerous websites, forums, and books offering advice on how to make your garden a little paradise for birds, but they sometimes overlook the importance of ornamental value. In his guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux, » landscape designer and ornithologist Daniel Gérard simply addresses the various ways to meet the basic needs of a diverse birdlife while also taking aesthetic considerations into account.
After a general introduction to this book, we offer an interview with its author, who offers practical advice for restoring or improving the capacity of your garden.
Le guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux », un ouvrage pratique
Daniel Gérard présentant la couverture de son guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux ». |
Le guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux » est un ouvrage pratique écrit par Daniel Gérard, fils et petit-fils de jardinier, passionné par les plantes, qui s’est naturellement orienté vers un cursus horticole et qui s’est formé à une passion connexe, l’ornithologie. Le but de l’auteur n’était pas d’expliquer comment créer un jardin idéal pour les oiseaux, mais de donner des conseils pour le rendre attractif tout en tenant compte de son esthétisme. En effet, il serait dommage de renoncer à un arbre ou un arbuste, que vous voudriez acheter ou conserver, sur le seul motif qu’il n’est présenté nulle part comme étant attractif pour l’avifaune. S’il est en effet courant de recommander l’emploi de végétaux indigènes, certaines plantes exotiques, non invasives et judicieusement choisies, peuvent également s’intégrer dans votre paysage privé, pour en faire un espace « bon pour les oiseaux et beau pour vous » (lire Conseils pour aménager son jardin pour les oiseaux).
Dans l’avant-propos, l’auteur rappelle l’importance d’abandonner certaines anciennes pratiques, de ne pas se fier à de « fausses bonnes idées » et de ne pas oublier que chaque mètre carré compte, et il explique les notions essentielles de niche écologique et de territoire.
Le premier chapitre, intitulé « Revoir ses pratiques jardinières », aborde des conseils généraux importants : renaturer son jardin, désimperméabiliser les sols, renoncer aux pesticides, éviter les monocultures, opter pour une taille raisonnée, éviter les jardins « minéraux » et le bêchage des massifs, limiter l’utilisation de machines, favoriser la quiétude des oiseaux et réduire la pollution lumineuse.
Le second chapitre, intitulé « Créer un jardin-refuge », traite de façon détaillée certains sujets, comme tondre sa pelouse tout en la rendant attractive pour les oiseaux, planter et entretenir des arbres isolés ou une haie, gérer les amas de branches et de bois mort (lire Créer une haie sèche pour aider les oiseaux et les autres petits animaux), et installer des mangeoires, des abreuvoirs et des nichoirs (lire Comment réduire les risques d’échecs de nidification des oiseaux dans les nichoirs ?). Il présente dans un encart dédié les services écologiques du lierre (lire Le Lierre grimpant, une plante utile pour les oiseaux toute l’année).
Dans son guide, Daniel Gérard énumère les inconvénients du bêchage, notamment pour la vie du sol. |
Le troisième chapitre, qui a pour titre « Les oiseaux que l’on peut observer au jardin », présente 48 espèces qui visitent régulièrement les jardins d’Europe de l’Ouest (lire Identifier les oiseaux des jardins et des parcs au printemps et en été).
Le quatrième chapitre (« Des plantes belles et utiles aux oiseaux ») présente 160 fiches pratiques de plantes indigènes et exotiques (fleurs annuelles et vivaces, couvre-sol, herbacées, arbres, arbustes, plantes grimpantes, etc.) combinant intérêt pour l’avifaune et esthétisme, après avoir souligné l’importance de proposer différentes strates (herbacée, arbustive, arborescente et transversale). Pour chaque espèce, on trouve une photo, un texte pratique (hauteur maximum, périodes de floraison et de fructification, etc.), son intérêt pour la faune (site de nidification, fourniture de baies et/ou attractivité pour les pollinisateurs), et le type de jardin pour laquelle il convient le mieux (petit, moyen ou grand).
Le dernier chapitre, intitulé « Quelques exemples d’aménagements », présente sous forme de dessins colorés des exemples de compositions de haies et de lisières.
Éditeur : Ulmer Illustrated édition (27 février 2025) – Broché – 224 pages – Dimensions : 17,2 x 1,8 x 22,2 cm – Prix : 22 euros (hors frais de port) –Commander le livre.
L’interview de Daniel Gérard, l’auteur du guide « Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux »
1- De nombreux guides et articles donnant des conseils pour créer un jardin accueillant pour les oiseaux ont déjà été publiés : pourquoi avez-vous décidé d’en écrire un ? Quelle est la particularité du vôtre ?
Daniel Gérard propose une approche équilibrée, conciliant esthétique et écologie, pour créer ou repenser un jardin attrayant. |
Daniel Gérard : ce projet est né d’une réflexion personnelle, qui s’est peu à peu concrétisée en un livre. De nombreux ouvrages traitent en effet déjà de l’accueil des oiseaux au jardin, mais aucun ne met en avant la corrélation entre le choix végétal et la fréquentation ornithologique. Mes expériences d’enseignant en paysage et d’ornithologue se croisent naturellement, et mes observations sur le terrain ne correspondaient pas toujours aux recommandations classiques. Partout, on prône l’emploi exclusif de végétaux indigènes, alors que nombre de plantes exotiques ou horticoles s’avèrent précieuses pour les oiseaux.
Ce livre propose donc une approche équilibrée, conciliant esthétique et écologie, pour créer ou repenser un jardin attrayant, tout en respectant la biodiversité. Par ailleurs, je remets en question certaines pratiques jardinières traditionnelles qui ne favorisent pas toujours la faune. Je pousse ainsi le lecteur à dépasser le dogme du « On a toujours fait comme ça », pour adopter des méthodes plus bénéfiques aux plantes et aux oiseaux.
2- Avez-vous aussi un jardin, dans lequel vous avez pu appliquer certains des conseils que vous donnez dans le guide ? Est-il particulièrement riche en oiseaux ?
Daniel Gérard : depuis quelques années, je suis privé de jardin autour de la maison. J’ai beaucoup exploré ceux des autres, au travers de diagnostics, d’inventaires et de conseils; mais durant ce printemps 2025, je vais enfin de nouveau disposer d’un jardin de 1 600 mètres carrés. Je compte bien sûr y appliquer les principes évoqués dans mon livre. Ma première action sera de supprimer les haies actuelles de Lauriers palmes (Prunus lauroceraus ‘Rotunfifolia’) et de Cyprès de Leyland (X Cupressocyoparis leylandii), que je qualifie de « béton végétal ». Mes élèves seront probablement impliqués dans les travaux, car beaucoup retrouvent dans cet ouvrage des notions abordées lors de mes cours. L’enseignement agricole intègre d’ailleurs de plus en plus la dimension écologique, une dynamique à encourager.
3 – Vous enseignez l’aménagement paysager à l’Établissement Public Local d’Enseignement et de Formation Professionnelle Agricoles (EPLEFPA) Naturapolis : formez-vous des agents entretenant les espaces verts ou des salariés d’entreprises dans le secteur ? Constatez-vous une évolution des mentalités et des pratiques pour la prise en compte de la faune dans l’aménagement et l’entretien des jardins ?
Daniel Gérard : j’enseigne aujourd’hui auprès de jeunes publics qui se destinent à travailler dans les métiers de l’aménagement paysager. Une partie de mes élèves évolue en contrat d’apprentissage, avec une expérience de vie d’entreprise importante. Chez les apprenants, beaucoup souhaitent concevoir et entretenir des espaces en respectant la biodiversité, et cette sensibilité va grandissante. Chez les professionnels en revanche, la situation est plus contrastée : certains adaptent leurs pratiques pour limiter leur impact, tandis que d’autres restent réticents. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir.
4- Vous avez rappelé l’effet néfaste des souffleurs de feuilles (érosion de la litière, etc.), et pourtant ils semblent être de plus en plus souvent utilisés dans les municipalités : que faire pour changer cela ?
Les souffleurs de feuilles sont bruyants et sont néfastes à la litière. |
Daniel Gérard : le souffleur de feuilles est une véritable calamité, et sa seule réelle utilité se résume au nettoyage de surfaces bitumées après travaux. C’est un excellent outil de finition. Ce qui fait défaut aux agents de collectivités territoriales, c’est l’information, et la formation. Je ne doute en effet pas que la plupart des gestionnaires d’espaces adapteraient leurs pratiques, une fois correctement informés. La litière représente une ressource précieuse pour les oiseaux, car il s’agit de la strate du sol la plus riche en invertébrés (faune épigée), qui nourrissent bon nombre d’insectivores (lire Il faut laisser au maximum les feuilles mortes dans les parcs et les jardins pour les oiseaux). Ajoutons que les souffleurs sont coûteux en énergie (carburants ou électricité), et passablement bruyants.
Le ramassage de feuilles manuel, complété par une aspiration dans les camions, est bien plus efficace. Les agents de services espaces verts de collectivités territoriales bénéficient de formations régulières, il suffirait donc d’y intégrer cette problématique.
5- Dans votre guide, vous insistez sur l’importance de la taille, en précisant que c’est la technique qui requiert le plus d’attention, car elle peut être très néfaste pour la faune et les végétaux. Quels sont selon vous les conseils essentiels pour bien tailler un arbre ou un arbuste ?
Daniel Gérard : l’essentiel est d’accepter l’idée que la manière dont on taille les végétaux ligneux depuis des années n’est peut-être pas la plus efficiente. Passé ce cap, on peut envisager d’autres techniques, souvent beaucoup plus simples, moins fastidieuses, qui génèrent beaucoup moins de rémanents (déchets verts), et garantissent de meilleures floraisons. Des floraisons plus abondantes signifient aussi plus de fructifications à destination de nos amis les oiseaux. Je détaille dans mon livre, pour chaque arbuste et arbre présenté, la meilleure manière de le tailler, s’il est nécessaire de le faire : il suffit d’observer le mode de ramification de l’arbuste, ainsi que son mode de floraison. De là découlent les interventions les plus respectueuses. Gardons en tête que pour obtenir le maximum de floraison, le mieux est de ne pas tailler du tout. En en effet, en aucun cas la taille n’encourage la floraison. Cette notion est largement démontrée par le collectif « Les Arbusticulteurs ».
6- Dans votre guide, vous proposez de nombreux arbres, arbustes et autres végétaux à planter dans un jardin, en précisant que vous avez éliminé des végétaux trop exigeants en termes de soins, trop gourmands en eau ou envahissants : auriez-vous des exemples d’espèces, pourtant intéressantes pour les oiseaux, que vous avez exclues ?
Les fruits du Lilas de Perse (Melia azedarach). |
Daniel Gérard : les fruits du Lilas de Perse (Melia azedarach) sont par exemple très prisés des oiseaux, notamment de l’Étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris), mais cet arbuste souffre dans les sols lourds et humides et craint les hivers froids. Le dérèglement climatique que nous connaissons n’exclut pas des hivers très rudes, et il serait donc réservé au quart sud de la France, ce qui est trop confidentiel pour figurer dans la gamme que je propose. C’est également une plante qui peut exiger d’être surveillée du fait de sa capacité à drageonner et à produire de nouveaux pieds là où on ne l’a pas planté initialement.
7- Vous avez défini qu’un petit jardin avait une surface de moins de 100 mètres carrés et que la surface d’un grand jardin dépassait les 1 000 mètres carrés : comment avez-vous choisi ces limites indicatives ?
Daniel Gérard : ce choix est tout à fait arbitraire et repose en fait sur les profils de jardins que je fréquente si souvent. Le choix des végétaux ne se réfléchit pas suffisamment par rapport aux surfaces disponibles : sur le terrain, je constate en effet d’innombrables « erreurs de casting », tant dans les jardins privés que sur les espaces publics. Pour choisir le bon arbre ou le bon arbuste au bon endroit, il faut avoir des repères, et c’est ce que j’essaie de proposer ici.
8- Est-il facile de renaturer un jardin typique de lotissement, composé d’une pelouse et d’une haie de thuyas ou de lauriers ?
Daniel Gérard : il suffit de le vouloir et de s’en donner le temps. Il ne s’agit pas de bouleverser les espaces existants, mais de les adapter progressivement jusqu’à obtenir le profil souhaité. Selon les contextes, cela peut passer par des compromis. Il faut aussi respecter l’habitude que l’on a de son espace et de se préserver des transformations brutales. L’idéal est de compartimenter le jardin, puis de travailler secteur par secteur, sur plusieurs années, en augmentant graduellement les surfaces moins tondues, par exemple. Dans le cas de plantations, c’est aussi plus doux pour le budget.
9- Si l’on dispose d’une belle haie ancienne de thuyas ou de lauriers, comment peut-on la conserver tout en l’enrichissant pour la rendre plus attractive pour l’avifaune ?
Daniel Gérard : j’ai un exemple personnel et tout à fait d’actualité pour illustrer cela. En effet, les haies de lauriers dont je souhaite me débarrasser dans mon futur jardin ont été plantées très près d’une clôture, que je risque de déchausser en arrachant ces arbustes à l’enracinement très fort. Je vais les receper (cet arbuste présente une forte capacité à repartir de sa souche), puis je gèrerai les suppléants qui reperceront de la souche, tous les trois ans, au sécateur. L’opération consistera à supprimer sur chaque souche les rameaux les plus vigoureux et à conserver les autres. Les rameaux conservés seront supprimés lors de l’intervention suivante. Aucune branche ne doit être raccourcie. La haie gardera ainsi un aspect irrégulier, bien plus naturel, et les lauriers fleuriront, fructifieront, et accueilleront probablement quelques nidifications.
Pour les thuyas (Thuya sp.), c’est plus compliqué et il vaut mieux envisager sa suppression et son remplacement.
10- Est-il difficile de renoncer à l’usage des pesticides dans un jardin ?
Étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris) mangeant les fruits du Pommier d’ornement hybride Malus x Zumi de la variété « Golden Hornet ». |
Daniel Gérard : c’est indispensable et facilité par le retrait progressif de la plupart des substances issues de la chimie de synthèse des rayons de jardineries. Il y a des solutions « maison » qu’il convient d’éviter également : des substances réputées biologiques, comme le vinaigre ou le sel, sont néfastes à très fortes concentrations pour les sols, alors que tout repose sur leur bonne santé. Il convient d’accepter la flore spontanée, les fameuses « mauvaises herbes », au moins à certains endroits. De la même manière, on ne doit pas chercher à éliminer la moindre petite attaque de ravageurs, dès son apparition. Deux axes de réflexion se dégagent : mettre en œuvre des mesures prophylactiques et favoriser le développement et l’activité des animaux auxiliaires.
11- Vous indiquez que la bouillie bordelaise est néfaste, car elle détruit aussi les champignons du sol : avez-vous pu constater les dégâts de l’usage de ce traitement pourtant considéré comme écologique ? Comment l’utiliser en limitant ses effets néfastes ?
Daniel Gérard : on en revient toujours à un problème de concentration. Le cuivre est un fongicide, et quand il est pulvérisé sur les feuillages, il finit sa course invariablement dans le sol. J’ai entretenu un potager partagé durant quelques années et j’ai pu accéder à une parcelle abandonnée par le jardinier qui me précédait : les feuillages des tomates sur les parcelles voisines étaient bleus en permanence ! Avec le temps, la vie mycélienne a reconquis mon sol, j’ai retrouvé des hyphes (= réseaux du mycélium des champignons supérieurs et des lichens) dans la terre, et même des carpophores (= parties aériennes des champignons supérieurs). Mon sol est ainsi « revenu d’entre les morts ».
Mes tomates étaient cultivées à l’abri de la pluie, je n’ai donc jamais souffert du mildiou, qui n’est pas un champignon par ailleurs, et contre lequel la bouillie bordelaise présente au mieux un effet fongistatique (elle empêche la croissance et la multiplication des champignons sans nécessairement les détruire). On sait aujourd’hui à quel point la vie de nos sols repose en tout premier lieu sur l’activité des champignons. Marc-André Selosse et bien d’autres ont largement vulgarisé ces notions scientifiques, et on ne peut plus l’ignorer aujourd’hui.
Utiliser la bouillie bordelaise n’est pas mauvais en soi, mais moins on l’utilisera, en réduisant la fréquence des pulvérisations et en évitant les surdosages, mieux les champignons du sol se porteront.
12- Vous avez écrit que les mélanges de graines vendues dans le commerce pour créer des prairies fleuries étaient peu intéressants pour la faune, et que même les prairies fleuries n’avaient que peu d’intérêt écologique : ne sont-elles pas plus intéressantes tout de même qu’une simple pelouse ?
Gazon fleuri. |
Daniel Gérard : absolument, écologiquement parlant, plus le nombre d’espèces représentées au m² est important, plus l’aménagement est riche. Je veux juste ici tempérer les espoirs que l’on peut nourrir par rapport à ces mélanges fleuris, notamment en termes de pérennité. Même les mélanges vivaces évoluent, et une ou deux espèces finissent par supplanter les autres. Le gazon fleuri n’a plus grand-chose du mélange original trois ou quatre ans plus tard.
13- Vous suggérez de planter ou de conserver dans le sol un tronc d’arbre mort (« chandelle »), pour y creuser des trous et mettre des graines en hiver par exemple : quelle est la hauteur maximum conseillée pour limiter les risques de chute ? N’y-a-t-il pas un risque de propagation de certains champignons dans un jardin ?
Daniel Gérard : la hauteur de la chandelle dépendra de sa proximité avec les bâtis ou les voies de circulation. L’aspect sécuritaire est une priorité. Même dans un coin éloigné de tout, dans un grand espace, il ne me semble pas utile de conserver un tronc de plus de sept mètres de haut.
La grande majorité des champignons saprophytes (polypores, xylaires, etc.) ne s’attaquent pas au bois vivant. Quelques rares saprophytes opportunistes (certains ganodermes notamment) peuvent effectivement contaminer un arbre vivant affaibli, mais c’est un risque marginal et tout à fait acceptable.
14- Les bambous sont-ils intéressants pour la faune ?
Daniel Gérard : le postulat de départ, c’est que toutes les formations végétales sont d’une manière ou une autre utiles à la faune. Les contre-exemples sont très rares, comme les renouées (Fallopia sp.) asiatiques qui appauvrissent très clairement la biodiversité des lieux qu’elles colonisent.
Un massif de bambous de plusieurs centaines de mètres carrés s’est développé par exemple près de chez moi, et j’entends tous les soirs le chœur d’un très grand groupe d’Étourneaux sansonnets (Sturnus vulgaris) qui l’utilise comme dortoir. Ils s’y sentent manifestement en sécurité, la considérant sûrement comme une roselière géante confortable et sécurisante.
15- Vous conseillez de planter un arbuste près d’une mangeoire ou une mare pour servir de refuge pour les oiseaux : auriez-vous quelques conseils d’arbustes pouvant jouer ce rôle efficacement ?
Daniel Gérard : n’importe quel arbuste à la ramification dense fera l’affaire, l’important étant qu’il présente un feuillage persistant, puisque les mangeoires sont utilisées en hiver. La Viorne tin (Viburnum tinus) est un exemple parfait.
16- Auriez-vous un exemple de composition d’une haie facile à planter dans un petit jardin urbain, au développement assez rapide, combinant richesse en fleurs et en baies, gîte pour permettre la nidification et beauté du feuillage en automne ?
Callicarpe de Bodinier (Callicarpa bondinieri) « Profusion ». |
Daniel Gérard : attention au paradoxe que je relève dans la demande : Si c’est pour un petit jardin, ça ne doit pas être au développement rapide. Si l’on souhaite une installation rapide, on emploiera des végétaux vigoureux, qui le resteront ensuite, mais seront-ils alors adaptés à un petit espace urbain ? L’Aronia noir (Aronia melanocarpa), le Callicarpe de Bodinier (Callicarpa bondinieri) « Profusion », la Viorne à feuilles de bouleau (Viburnum betulifolium), l’Amélanchier du Canada (Amelanchier canadensis) « October Flame », le Fusain d’Europe (Euonymus europaeus) « Red Cascade » ou l’Épine-vinette de Darwin (Berberis darwinii) peuvent se côtoyer avantageusement dans une haie répondant à votre demande.
17- Quels sont pour vous les trois arbres, les trois arbustes et les trois plantes grimpantes les plus attractifs pour les oiseaux à conseiller en priorité pour les propriétaires d’un jardin moyen ?
Daniel Gérard : les arbres que je conseillerais appartiennent aux genres Sorbus (sorbiers et alisiers), Malus (pommiers) et Cornus mas (cornouillers). Les arbustes les plus recommandés sont ceux des genres Cotoneaster (cotonéasters), Viburnum (viornes) et Sambucus (sureaux, notamment les cultivars modernes et colorés). Enfin, les plantes grimpantes les plus importantes, selon moi, appartiennent aux genres Hedera (lierres) (avant tout !), Lonicera (chèvrefeuilles) et Rubus (ronces fruitières).
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Compléments
À lire sur le web
Le site web des Arbusticulteurs : www.arbusticulteurs.com
Ouvrages recommandés
- Créer un beau jardin-refuge pour les oiseaux de Daniel Gérard et Olivier Fontaine
- Comment attirer les oiseaux sur son balcon ou dans son jardin de E.Gismondi, Catherine Baldisserri
- Nourrir et abriter les oiseaux de André Mauxion
- Nourrir les oiseaux dans sa main de Wiberg




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