Présentation et plantation du Lierre grimpant

Platane au tronc couvert de lierre

Platane commun (Platanus sp.) couvert de lierre dans le cimetière parisien de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) en juin 2018. Un couple de Troglodytes mignons (Troglodytes troglodytes) y a construit son nid.
Photographie : Ornithomedia.com

Le Lierre grimpant (Hedera helix) est une liane originaire d’Europe et d’Asie Mineure (Chypre et Turquie) qui peut adopter un port rampant ou grimpant selon le support et atteindre 30 mètres de long. Ses feuilles sont coriaces, luisantes et persistantes : elles ne tombent qu’une fois tous les six ans environ. Celles qui sont portées par la tige principale (dites caulinaires) sont pétiolées (trois ou cinq lobes pointus et peu marqués), tandis que celles des rameaux florifères sont entières, ovales et terminées en pointes effilées. Les rameaux portent des crampons qui sont en fait des racines transformées émettant de nombreux poils ventouses qui s’accrochent au support.
Le Lierre grimpant peut vivre 400 ans, soit souvent plus longtemps que son support, et l’on voit ainsi souvent des arbres morts recouverts, ce qui contribue à sa mauvaise réputation.   
Il pousse aussi bien à l’ombre qu’au soleil, mais il a besoin de lumière pour fleurir et fructifier : en effet, les fleurs ne se développent que sur les rameaux bien exposés au soleil. Il préfère les sols calcaires et frais, mais non gorgés d’eau. Il peut être planté toute l’année, mais son installation est plus rapide s’il est planté au printemps ou en automne : arrosez-le généreusement lors de sa plantation.  
La solution du bouturage est également très facile : il suffit d’enfoncer, dès le mois de septembre, des pousses terminales dans un godet de terreau : les boutures s’enracinent en un mois, mais il faut attendre plusieurs mois, voire un an, avant de les transplanter à l’ombre, de préférence au printemps.
Le lierre peut être utilisé pour couvrir le sol ou des supports variés, mais comme il s’accroche avec des ventouses, il laisse des traces inesthétiques sur les murs quand on veut l’arracher : il vaut mieux donc le planter au pied d’un arbre, ce qui a beaucoup d’avantages.
Il aurait enfin la faculté d’absorber certaines substances toxiques de l’air des villes.

Des fruits disponibles aussi une partie de l’hiver

Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla)

Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla) dans le Lierre grimpant (Hedera helix) à La Beylie (Corrèze) le 6 mai 2017.
Photographie : Jean Morillon / Sa galerie Flickr

Les fleurs (ombelles terminales) hermaphrodites sont jaune verdâtre et globuleuses, et la floraison est décalée par rapport à celle de la plupart des autres plantes : elle s’étale en septembre et en octobre, et la fructification s’étale de la fin l’hiver (parfois dès janvier) au début du printemps. Le lierre présente donc un cycle phénologique inversé par rapport aux plantes dont il se sert comme support. Ce sont parmi les dernières fleurs en saison à offrir du pollen aux abeilles : la Collète du lierre (Colletes hederae), un hyménoptère solitaire, est d’ailleurs inféodée au lierre.
Les fruits du lierre grimpant sont des baies de huit à dix mm de diamètre, noir bleuté, groupées en ombelles et renfermant de trois à cinq graines. Elles sont toxiques pour l’Homme, mais elles sont riches en lipides (qui représentent 30 % de la pulpe située entre les graines) et jouent ainsi un rôle important pour la survie de nombreux passereaux (mésanges, pinsons, rougegorges, geais, merles, grives, etc.)  sédentaires, hivernants ou migrateurs (voir plus bas).
La dispersion des graines est directement liée à cette consommation, car les oiseaux ne les digèrent pas et elles sont alors recrachées par le bec ou éjectées via les fientes. Contrairement aux passereaux, les Pigeons ramiers (Columba palumbus) les mangent et ils ne sont donc pas des vecteurs de la propagation de la plante.

Une association bénéfique entre les arbres et le lierre

L’association entre un arbre et le lierre bénéficie aux deux parties : le premier sert de support au second, qui en retour le protège des agressions extérieures. Le lierre n’est pas une plante parasite car il ne se nourrit que grâce à ses racines souterraines. Il n’est pas non plus une liane étrangleuse qui empêche l’arbre de grandir ou qui le déforme comme les chèvrefeuilles (Lonicera sp.) ou les Ficus étrangleurs (Ficus sp.), car il s’adapte constamment à la croissance du tronc.
Il agirait comme un isolant thermique, protégeant les troncs abîmés ou affaiblis par une coupe ou un élagage (lire L’élagage de printemps et d’été, une menace pour les oiseaux et les arbres) par temps très chaud ou très froid.
Il diminuerait les effets destructeurs du passage du feu ou de l’action des mammifères herbivores (chevreuils, cerfs, etc.) et des rongeurs sur l’écorce.
Il absorberait l’excès d’humidité au sol, autour du tronc, et aurait une action chimique inhibitrice sur les champignons, bactéries ou parasites pouvant s’attaquer au tronc.
Il héberge des insectes prédateurs des pucerons et des autres « ravageurs » : en particulier, il est important pour les coccinelles. 
Telle une guirlande, le lierre décore toute l’année les arbres abîmés, vieillissants ou morts. On choisira l’automne pour les travaux de taille afin d’éviter de déranger la faune. 
Il faut toutefois préciser que s’il atteint une certaine taille, le lierre peut augmenter la prise au vent ou le poids d’un arbre et provoquer sa chute. Par ailleurs, s’il atteint le toit ou les châssis des fenêtres ou s’il s’infiltre dans les fissures d’un mur, il peut provoquer des dégâts : il conviendra donc de surveiller son développement.

Une grande utilité pour les oiseaux toute l’année

Nid et oisillon de Troglodyte mignon dans le lierre

Nid et oisillon (le voyez-vous ?) de Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes) dans le lierre couvrant un platane dans le cimetière parisien de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) en juin 2018.
Photographie : Ornithomedia.com

Le Lierre grimpant sert de refuge, de lieu de nourrissage et de nidification à un grand nombre d’invertébrés et de vertébrés, et son association avec un arbre crée un écosystème riche : par exemple, un grand chêne au tronc couvert de lierre pourrait abriter plus de 700 organismes vivants différents ! Ses fleurs nourrissent beaucoup d’insectes butineurs à la fin de l’automne grâce à ses fleurs tardives.
Mais c’est surtout une plante utile pour les oiseaux, et à planter donc dans son jardin (lire Aménager son jardin pour les oiseaux). Étant le premier à produire des fruits, parfois dès janvier, il permet aux premiers migrateurs de  se nourrir de ses baies sombres riches en antioxydants (lire Des fruits riches en antioxydants dans votre jardin pour les oiseaux) et en lipides, comme le Merle noir (Turdus merula), les Grives mauvis (Turdus illiacus), litorne (T. pilaris), draine (T. viscivorus) et musicienne (T. philomelos), la Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla), l’Accenteur mouchet (Prunella modularis), l’Étourneau sansonnet (Sturnus vulgaris) ou le Pigeon ramier. 
Les insectes et les araignées y abondent, ce qui attire de nombreux insectivores comme les mésanges, le Rougegorge familier (Erithacus rubecula) ou le Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes), en particulier durant la période de nourrissage des jeunes.

Un bon support pour construire un nid

Beaucoup d’oiseaux y construisent leurs nids qui sont ainsi bien dissimulés dans l’entrelacs de ses branches : par exemple, le Troglodyte mignon y installe son nid en forme de sphère parfaite (lire Identifier les nids et les oeufs des oiseaux des villes et des jardins), le Merle noir sa coupole en demi-sphère en torchis tapissée de mousse et de plumes, l’Orite (Mésange) à longue queue (Aegithalos caudatus) son nid ovale fait de mousses, de lichen et de toiles d’araignées, et le Rougegorge familier son hémisphère composé de mousses et d’herbes sèches. Le Roitelet triple-bandeau (Regulus ignicapilla) préfère installer son nid dans un arbre couvert de lierre car il préfère éviter qu’il ne touche le tronc.   
On peut rendre une haie plus accueillante pour les oiseaux en plantant du lierre au pied de quelques-uns des arbustes qui la composent.
Le lierre est enfin aussi utile pour les mammifères : le Lérot (Eliomys quercinus) et le Renard roux (Vulpes vulpes) apprécient grandement ses baies, et les chauves-souris y trouvent un site de repos idéal. 

Le Merle noir chanterait davantage quand il y a du lierre dans son territoire

Merle noir dans le lierre

Merle noir (Turdus merula) mâle mangeant des baies de Lierre grimpant à Mont sur Marchienne (Belgique) en janvier 2016.
Photographie : Christine Van Bever

Plusieurs études ont montré que l’abondance de la nourriture disponible influençait le chant des oiseaux, et Hesler et al. avaient constaté chez le Merle noir mâle l’existence d’une corrélation positive entre la superficie du territoire et ses qualités physiques (dimensions et corpulence) : le répertoire vocal de cette espèce pourrait donc être considéré comme un indicateur de la qualité de son domaine. 
Dans un article publié en 2014 dans la revue Avocetta, des biologistes ont présenté les résultats de leur étude de 19 territoires de Merles noirs dans la chaîne des Apennins. La végétation a été décrite, et notamment l’abondance de Lierres grimpants sur les troncs des arbres, et la fréquence des chants territoriaux a été notée. Ils ont découvert une relation entre la présence de ces lianes et l’activité vocale des mâles. Pour les auteurs, cela s’expliquerait par l’utilité du Lierre grimpant pour le Merle noir : support pour le nid, production de baies, richesse en insectes entre les feuilles et les branches et accumulation de litière à sa base, très attractive pour les invertébrés.

Un refuge en hiver

Beaucoup d’espèces d’oiseaux s’y réfugient tout au long de l’année, en été (lire Faire de son jardin une oasis pour les oiseaux en plein été) et lors des froides nuits d’hiver (lire Comment les oiseaux supportent-ils les nuits d’hiver et comment les aider ?) : en effet, son feuillage compact a un rôle isolant. Des passereaux variés y dorment, comme les Moineaux domestiques (Passer domesticus) qui y forment des dortoirs collectifs (lire Le déclin du Moineau domestique à Londres et à Paris), mais également des espèces plus grandes comme la Chouette hulotte (Strix aluco) ou le Hibou moyen-duc (Asio otus).

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