Les Corvidés (corbeaux corneilles, pies, choucas, etc.) sont connus pour leurs remarquables capacités cognitives et d’adaptation (lire Le cerveau et l’intelligence des oiseaux), et les exemples sont nombreux : des Corbeaux familiers (Corvus splendens) et des Témias vagabondes (Dendrocitta vagabunda) éteignent les mèches en coton de lampes à huile en Inde pour les consommer ensuite (lire Des Corbeaux familiers éteignent les mèches en coton de lampes à huile pour les consommer ensuite), des Grands Corbeaux (C. corax) ont réussi à compter jusqu’à huit, le Geai des chênes (Garrulus glandarius) et le Cassenoix moucheté (Nucifraga caryocatactes) ont une grande mémoire qui leur permet de stocker des graines dans de nombreuses caches à l’automne et de les retrouver plusieurs mois plus tard (lire Une mémoire de Cassenoix moucheté), les Corneilles d’Amérique (C. brachyrhynchos) se rassemblent autour des cadavres de leurs congénères (lire Les « funérailles » des corneilles les aideraient à identifier les menaces) et aiment jouer (lire les oiseaux peuvent-ils prendre du plaisir et s’amuser ?), etc.

Ce sont des prédateurs opportunistes, au régime alimentaire très diversifié incluant des charognes, des déchets, des œufs, des petits vertébrés, des invertébrés, des graines et des fruits, et parfois des aliments plus inattendus : en Amérique du Nord, la Corneille d’Alaska (C. caurinus) mange par exemple régulièrement des oursins, et des biologistes allemands ont décrit des cas de Corneilles noires (C. corone) se nourrissant de façon occasionnelle d’oursins-cœurs (Echinocardium cordatum) sur deux plages de Bretagne à marée basse (lire Des Corneilles noires mangeant des oursins en Bretagne). 

La Fourmi de feu (Solenopsis invicta), originaire d’Amérique du Sud, a été importée involontairement en Alabama (États-Unis) dans les années 1930, d’où elle s’est ensuite répandue dans tout le sud du pays. Comme d’autres espèces de fourmis invasives, elle peut devenir une menace pour certains oiseaux : dans une zone côtière de 202 hectares du Texas, on a par exemple constaté qu’elle avait divisé par cinq le nombre de Colins de Virginie (Colinus virginianus), et que dans la ville texane de Commerce, 25 % des nids d’une colonie d’Hirondelles rustiques (Hirundo rustica) avaient été détruits par ces invertébrés (lire Certaines fourmis invasives constituent-elles une menace pour les oiseaux nicheurs ?).

Pour contourner le désagrément causé par l’omniprésence des Fourmis de feu et leur voracité, qui les conduit à s’accaparer tous les aliments accessibles, les Corneilles d’Amérique doivent faire preuve d’ingéniosité. Dans un article publié dans le Bulletin of the Texas Ornithological Society, un observateur a décrit le comportement intéressant d’une famille composée de deux adultes et de trois jeunes dans le comté de Bastrop, au Texas, une zone infestée par les Fourmis de feu. L’auteur leur offrait régulièrement des aliments (croquettes, morceaux de viande, etc.) dans une mangeoire, mais par temps chaud, ils attiraient rapidement les fourmis. Afin de s’en débarrasser, les corneilles adultes transportaient la nourriture dans une coupelle remplie d’eau : les morceaux de viande coulaient alors rapidement, et les hyménoptères s’en détachaient immédiatement pour remonter à la surface. Avec les aliments secs, comme les croquettes, les oiseaux facilitaient le processus en les plongeant ou en les poussant sous la surface à plusieurs reprises.

Parfois, les corneilles restaient immobiles et attendaient que les fourmis quittent les aliments, ce qui pouvait prendre jusqu’à trois ou quatre
minutes. L’utilisation de l’eau pour nettoyer la nourriture a été observée chez plusieurs espèces (lire Pourquoi certains oiseaux plongent-ils parfois leurs aliments dans l’eau avant de les manger ?), et le comportement observé au Texas constitue un autre cas d’usage. 

Corneille d’Amérique (C. brachyrhynchos) mouillant des aliments avant de les consommer. 
Source : Tamney M-13

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