Très important afflux de Faucons kobez en Pologne en août et en septembre 2025

Le Faucon kobez (Falco vespertinus) se reproduit dans les zones ouvertes (steppes et cultures) s’étendant de la Slovaquie, de la Hongrie et de l’Italie (lire Les populations de Faucons crécerellettes et kobez semblent toujours en progression dans la plaine du Pô en 2019) à la Sibérie (lac Baïkal). En 2004, la population européenne était comprise entre 30 000 et 64 000 couples, dont de 20 000 à 30 000 couples dans l’ouest de la Russie, de 3 200 à 5 100 couples en Ukraine, de 1 300 à 1 600 couples en Roumanie, de 600 à 700 couples en Hongrie, de 250 à 600 couples en Serbie-et-Monténégro et de 70 à 90 en Moldavie et en Italie. Dans ce dernier pays, elle a augmenté depuis, atteignant désormais plus de 130 couples. Il hiverne en Afrique australe en survolant au automne les Balkans et l’est du bassin méditerranéen à partir du mois d’août, et rejoignant en avril-mai ses sites de nidification.

Ce rapace est connu pour ses irruptions printanières en avril et surtout en mai (lire Comment peut-on expliquer les afflux printaniers de Faucons kobez ?), mais ces phénomènes peuvent également se produire, bien que plus rarement, en automne.

Aire de nidification européenne du Faucon kobez (Falco vespertinus) (en rouge) et emplacements de plusieurs données lors de l’afflux d’août et septembre 2025 en Pologne (points rouges). Carte : Ornithomedia.com d’après Ornitho.pl

En Pologne, le Faucon kobez est un migrateur irrégulier et un nicheur occasionnel. Depuis la fin du mois d’août 2025, on y assiste à un afflux particulièrement important, qui se poursuit à la date de publication de cet article (11 septembre 2025). Des troupes de plusieurs dizaines d’individus ont été signalées d’après le site web Ornitho.pl, très majoritairement au centre et à l’est du pays (dans les districts administratifs ou voïvodies de Podlachie, de Grande-Pologne, de Petite-Pologne, de Mazovie, d’Opole, des Basses-Carpates, de Podlachie, de Silésie et surtout de Lublin). Parmi les données remarquable récentes, citons 60 oiseaux à Bielsk Podlaski (Podlachie) et 60 à Mogielnica (Mazovie) le 9 septembre, 54 oiseaux à Końskowola, 73 à Kurów et 51 à Stężyca (Lublin), 40 à Ceranów (Mazovie) et 50 à Bielsk Podlaski (Podlachie) le 7 septembre et 52 oiseaux à Zamość et 60 à Piaski (Lublin) le 6 septembre. 

Nous n’avons pas trouvé d’informations sur une éventuelle arrivée automnale inhabituellement élevée plus à l’ouest, par exemple en Allemagne, où un afflux remarquable avait pourtant été noté en septembre 2023 (lire Afflux remarquable de jeunes Faucons kobez en Allemagne en septembre 2023).

L’important afflux en Pologne à la fin de l’été 2025 n’est pas unique. Entre le 10 août et le 27 septembre 2012, plus de 100 Faucons kobez avaient ainsi été recensés lors de 48 observations rien que dans la voïvodie de Silésie. Entre 2014 et 2016, 2 805 individus avaient été comptés lors de trois irruptions successives en août et en septembre dans le centre-est de la Pologne (principalement dans la province de Mazovie), contre une moyenne de moins de dix individus lors d’une saison normale.  

Un article publié en 2017 dans le Polish Journal of Ecology avait décrit les caractéristiques des individus observés lors de ces irruptions automnales : 73 % étaient des oiseaux de première année, ils chassaient essentiellement des coléoptères et des orthoptères, et le pic de leur passage avait été atteint autour du 20 septembre. Les auteurs avaient également présenté plusieurs hypothèses pouvant expliquer ces phénomènes : des vents d’Est et de Sud-est soutenus, des températures élevées à la fin de l’été et un nombre important de naissances dans les populations d’Europe orientale.  

Faucons kobez (Falco vespertinus) dans la vallée de la rivière Biebrza, dans le nord-est de la Pologne, le 8 septembre 2025 (cliquez sur la photo pour l’agrandir). Photographie : Photographie : Oliwier Myka / sa page X

La seule différence météorologique notable constatée lors des irruptions de 2014 à 2016 était en effet que des vents d’Est et de Sud-est, qui accompagnaient des anticyclones centrés sur le nord-est de l’Europe, soufflaient un peu plus fort et de façon plus constante que lors d’un automne « habituel », ce qui aurait pu favoriser l’arrivée de ces rapaces orientaux. La température moyenne était aussi légèrement supérieure (17,7 degrés contre 16,6 degrés), ce qui aurait pu prolonger leur période de dispersion postnuptiale et augmenter l’activité des insectes. Les auteurs évoquent l’influence possible du réchauffement climatique, qui pourrait ainsi indirectement augmenter la fréquence des irruptions automnales de jeunes Faucons kobez à l’ouest de leur aire de nidification. Par exemple, des épisodes successifs de sécheresses estivales pourraient pousser les jeunes oiseaux à chercher de nouvelles zones de nourrissage, comme cela est aussi observé pour le Rollier d’Europe (Coracias garrulus) (lire La croissance de la population française de rolliers, une exception en Europe).

Un facteur très important a également été abordé par les auteurs de l’article : l’accroissement des populations nicheuses et de leur productivité dans les pays voisins de la Pologne, principalement en Hongrie, où le nombre de couples a augmenté de façon constante depuis 2010 : il a ainsi doublé entre 2006 et 2014, grâce notamment à la pose de nichoirs. Selon une étude publiée en 2020 dans la revue BioRXiv analysant les origines de 18 Faucons kobez immatures (de première ou de seconde année) bagués observés en Allemagne, majoritairement en août et en septembre, 14 provenaient de Hongrie, trois d’Italie et un de Roumanie. Une origine roumaine avait aussi été notée pour au moins un oiseau bagué arrivé dans le sud de la Pologne lors d’un afflux postnuptial.

Ces afflux de fin d’été d’une espèce orientale en Europe centrale rappellent celles impliquant le Cormoran pygmée (Microcarbo pygmaeus) (lire Nouvelle arrivée estivale importante de Cormorans pygmées en Europe centrale en août 2023).