L’Hypolaïs pâle (Iduna pallida)

Hypolaïs pâle (Iduna pallida)

Hypolaïs pâle (Iduna pallida) près du phare de la Gacholle en Camargue (Bouches-du-Rhône) le 3 mai 2023. Notez (1) le bec fin et pointu, (2) les sourcils pâles nets et les lores sombres, (3) le dessus gris-brun, (4) le « panneau » pâle sur les ailes (plumage frais), (5) le dessous blanchâtre teinté de chamois sur les flancs, (6) les rectrices externes bordées de blanc et (7) la projection primaire moyenne (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Quentin Betencourt

Longueur : 11,5 – 13,5 cm.

Description : l’Hypolaïs pâle a une silhouette élancée. Son front est moins « abrupt » que celui de l’Hypolaïs polyglotte (Hippolais polyglotta) (lire Comment distinguer les Hypolaïs ictérine et polyglotte ?). Les parties supérieures sont gris-brun teintées d’olivâtre, tandis que le dessous est blanchâtre et teinté de chamois sur les flancs et la poitrine.
Ses sourcils sont de couleur crème, étroits mais bien délimités. Ils s’étendent de la base du bec à l’avant des yeux. Les lores sont un peu plus sombres.
La projection primaire est moyenne, atteignant la moitié de la longueur de la partie visible des rémiges tertiaires.
Les rectrices externes de la queue sont bordées de blanc.
Chez l’adulte en plumage frais (de décembre à avril), les rémiges secondaires sont bordées de chamois clair et ont l’extrémité blanchâtre, formant un « panneau » pâle quand l’aile est fermée. L’alula (l’ensemble des petites plumes fixées sur le pouce) est brun sombre et contraste avec le reste de l’aile. Les deux rectrices externes ont leur extrémité blanche. 
L’adulte en plumage usé (de juillet à septembre) a le dessus plus terne, plus uniforme, davantage gris-brun froid. Le panneau pâle des ailes est moins visible. Les sourcils sont blanc chamois plus clair. Les lores sont aussi plus pâles, avec une tache noire plus prononcée à l’avant des yeux. Le cercle oculaire est moins visible.  
L’oiseau de premier hiver ressemble à l’adulte en plumage frais, mais ses rectrices externes n’ont pas une extrémité blanche. Ses ailes et sa queue sont plus brunes.
Les pattes sont fines et assez petites, de couleur gris-brun avec une nuance rose.
Le bec est long et pointu, à base large et aux bords un peu concaves. La mandibule supérieure est sombre et sa mandibule inférieure est orange-rosé.  

Mue : la mue de l’adulte, qui touche dans un premier temps certaines plumes de la tête et du corps, débute dès la fin du mois de juillet, avant la migration d’automne. Elle se poursuit en automne mais surtout dans les quartiers d’hivernage africains : l’oiseau a donc un plumage entièrement frais (mué) à la fin de l’hiver.
Le juvénile subit une mue partielle touchant la tête et le corps peu après avoir quitté le nid, puis une mue complète en Afrique.

Le chant : le chant est fort et vigoureux mais répétitif et monotone, rappelant celui de la Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus) mais plus rapide. Il est composé de notes rauques et grinçantes réparties dans des séquences de deux à cinq secondes montantes et descendantes, répétées sans pause de façon cyclique, parfois pendant plus de 30 secondes. Dans les quartiers d’hiver africains, le chant est plus calme et plus « décousu ».

Écoutez ci-dessous un enregistrement du chant de l’Hypolaïs pâle réalisé par Lars Lachmann en Géorgie le 2 juin 2019 (source : Xeno-Canto) :

Les cris : les cris les plus communs sont des  « tack tack » durs et nasillards, rappelant la Fauvette à tête noire (Sylvia atricapilla) et émis notamment durant la période de nidification. L’Hypolaïs pâle lance aussi des « trrt trrt » répétés quand elle est inquiète. 

Écoutez ci-dessous un enregistrement des cris de l’Hypolaïs pâle réalisé par Gabriel Leite en Grèce le 10 juillet 2017 (source : Xeno-Canto) :

Hypolaïs pâle (Iduna pallida)

Hypolaïs pâle (Iduna pallida) près du phare de la Gacholle en Camargue (Bouches-du-Rhône) le 3 mai 2023. Notez (1) les sourcils pâles, (2) les lores sombres et (3) l’alula qui contraste avec le reste de l’aile (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Quentin Betencourt

Comportement : l’Hypolaïs pâle est très active et se distingue par son habitude d’abaisser régulièrement sa queue comme une bergeronnette, notamment quand elle se nourrit, tout en lançant des « tack » (voir la vidéo à la fin de cet article). Elle arrête toutefois de l’agiter, sauf de façon occasionnelle entre deux séquences de son chant. Elle est peu farouche mais elle reste souvent cachée dans le feuillage, n’offrant que des vues furtives.
Le mâle chante vigoureusement depuis un perchoir situé près du sommet d’un buisson, mais pas à découvert. Il chante aussi en vol, s’élevant verticalement et descendant en diagonale, les ailes relevées, en direction d’un nouveau perchoir. Il chante durant toute la période de nidification, jusqu’au début du mois d’août.
Cette espèce est territoriale, mais forme parfois des colonies « lâches ». Le nid est construit dans un buisson ou un arbre, entre un mètre et neuf mètres de haut.
La ponte débute à la fin du mois de mai ou en juin.
La migration postnuptiale débute dès la mi-juillet, et les premiers oiseaux arrivent en Afrique dès le mois d’août. Le retour vers les sites de nidification commence à partir de fin mars : les premiers oiseaux atteignent le sud de la Turquie à partir de la mi-avril, et les Balkans à la fin de ce mois.

Habitats : l’Hypolaïs pâle niche dans les zones buissonneuses sèches, les oliveraies et les oasis (dans le Sahara). En hiver, elle stationne dans les habitats broussailleux arides et semi-arides sous 1 600 mètres d’altitude, ainsi que dans les savanes. 

Aire de répartition et taxonomie

L’Hypolaïs pâle niche du sud-est de l’Europe (à l’est de la Slovaquie) à l’Asie centrale en passant par le Moyen-Orient, et de façon fragmentée en Afrique (du sud-est du Maroc à l’Égypte et à la Somalie en passant par le Niger, le Nigeria et le Soudan). 

Aire de répartition de l'Hypolaïs pâle (Iduna pallida)

Aire de répartition de l’Hypolaïs pâle (Iduna pallida) : en rouge, présence en été seulement, en violet, présence toute l’année et en bleu, présence en hiver. La situation de la Camargue (Bouches-du-Rhône), où un individu a été observé en mai 2023, est indiquée.
Carte : Ornithomedia.com d’après Birds of the World

Cinq sous-espèces, qui diffèrent principalement par la couleur de leurs parties supérieures et leur taille, sont reconnues :

  • I. p. pallida : de l’Égypte au nord du Soudan.  
  • I. p. elaeica : du sud-est de l’Europe à la Turquie et à l’ouest de la Chine, en passant par le Caucase, le Proche-Orient (Israël, Jordanie et Irak) et l’ouest de l’Iran. Cette sous-espèce est la plus grande, est la plus grise dessus et a la plus longue projection primaire.  
  • I. p. reiseri : dans les oasis du nord-ouest du Sahara. Elle ressemble à I. p. pallida, mais avec un dessus légèrement plus pâle et plus sable et un croupion plus ocre. En plumage usé, le dessus devient plus gris.
  • I. p. laeneni : de la limite sud du Sahara au lac Tchad et à l’ouest du Soudan. Un peu plus petite que I. p. reiseri.
  • I. p. aiulensis : des rives de la mer Rouge et au golfe d’Aden.

Une espèce rare et accidentelle en Europe de l’Ouest

L’Hypolaïs pâle est très rare et accidentelle en Europe de l’Ouest, mais c’est logiquement la sous-espèce I. p. elaeica qui est la plus susceptible d’y être vue, grâce en particulier aux phénomènes du dépassement d’aire printanier ou de la migration inversée automnale (lire Comment arrivent les oiseaux rares ?). On estime que la Grèce et la Turquie accueillent respectivement de 100 000 à 150 000 et de 500 000 à 5 millions de couples, mais les Alpes et les Carpates constituent des barrières géographiques efficaces : en effet, on ne recense que trois données en Allemagne entre 1883 et 2000. En outre, bien que cette espèce niche en Slovaquie et en Hongrie, il n’y a qu’une observation confirmée en Autriche. 
Jusqu’en 2017, on ne recensait que 21 données acceptées en Europe, dont 14 depuis 2000. En Grande-Bretagne, onze observations avaient été documentées jusqu’en 2003, principalement sur les îles Shetland (lire Les îles Shetland, une destination ornithologique passionnante en automne) et Scilly (lire Les îles Scilly ou Sorlingues l’archipel aux oiseaux accidentels rares).
En France, c’est également une espèce accidentelle rare, mais un oiseau a été observé le 5 mai 2023 près du phare de la Gacholle en Camargue (Bouches-du-Rhône) (lire Où observer les oiseaux en Camargue ?), et un autre (?)  le 23 mai sur la Digue à la mer, également dans le delta du Rhône (voir une sélection d’observation récentes).
Il est toutefois possible que la difficulté d’identification de cette espèce explique en partie la rareté des données. 

La distinguer de l’Hypolaïs obscure (Iduna opaca)

Comparaison de l'étendue du blanc des rectrices externes de trois espèces d'hypolaïs

Comparaison de l’étendue du blanc des rectrices externes de la queue de trois espèces d’hypolaïs.
Schéma : Ornithomedia.com d’après K. Baker

L’Hypolaïs obscure (Iduna opaca) niche en Espagne et en Afrique du Nord, et elle ressemble étroitement à l’Hypolaïs pâle (lire Identifier et observer l’Hypolaïs obscure en Espagne). Leurs aires de répartition et d’hivernage sont nettement distinctes.
Plusieurs critères permettent de la différencier de la sous-espèce I. p. elaeica de l’Hypolaïs pâle : 

  • son bec est un peu plus large, long et épais, et ses bords sont légèrement convexes et non pas droits ou concaves.
  • Les lores sont plus pâles et se « fondent » dans les sourcils, créant une expression plus « douce ». 
  • Les parties supérieures sont brun sable et non pas gris-olive. 
  • L’absence de panneau pâle sur les ailes (les rémiges secondaires ne sont pas bordées d’une zone claire).
  • Les rectrices externes de la queue sont plus faiblement bordées de blanc (voir notre schéma).
  • La queue est proportionnellement plus longue.
  • Elle n’agite pas constamment sa queue vers le bas. 
  • Son chant est différent.

La distinguer de la Rousserolle effarvatte (Acrocephalus scirpaceus

La Rousserolle effarvatte niche dans les roselières de l’Europe de l’Ouest à l’Asie centrale (lire Distinguer les Rousserolles effarvatte et verderolle). L’Hypolaïs pâle est assez semblable à une Rousserolle effarvatte « décolorée » (taille et forme de la tête similaires, long bec mince et sourcils clairs s’étendant peu à l’arrière des yeux), mais plusieurs critères permettent de différencier assez facilement cette dernière :

  • les parties supérieures sont plus brunes et teintées d’olivâtre.
  • Le croupion est brun-roux ou brun-olivâtre et pas grisâtre.
  • Les parties inférieures sont nettement chamois.
  • La projection primaire est plus longue. 
  • L’extrémité de sa queue est plus arrondie. 
  • Les couvertures sous-caudales sont plus longues. 
  • Elle n’agite pas constamment sa queue vers le bas. 
  • Le chant est différent.

La distinguer de l’Hypolaïs d’Upcher (Hippolais languida)

Hypolaïs pâle (Iduna pallida)

Hypolaïs pâle (Iduna pallida) près du phare de la Gacholle en Camargue (Bouches-du-Rhône) le 3 mai 2023. Notez (1) les sourcils pâles, (2) le dessus gris-brun, (3) le « panneau » pâle sur les ailes (plumage frais), (4) les rectrices externes bordées de blanc, (5) le dessous blanchâtre teinté de chamois sur les flancs, (6) les pattes sombres et (7) la projection primaire de longueur moyenne (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Quentin Betencourt

L’Hypolaïs d’Upcher niche dans les zones buissonneuses et rocailleuses du sud-est de la Turquie à l’Asie centrale et à l’Iran en passant par la Syrie, le Liban et Israël. Son aire de répartition chevauche donc celle de la sous-espèce I. p. elaeica de l’Hypolaïs pâle au Proche-Orient.
Elle se distingue de cette dernière par :

  • une taille supérieure (longueur de 14 à 15 cm).
  • un bec plus long et plus épais, avec la mandibule inférieure nettement rose.
  • Une tête avec une structure plus « lourde ». 
  • Des parties supérieures plus pâles et plus grises.
  • Un « panneau » pâle plus visible en plumage frais.
  • Une queue plus longue et plus large, au-dessus plus sombre et agitée de façon plus « frénétique ».

La distinguer de l’Hypolaïs rama (Iduna rama)

L’Hypolaïs rama niche dans les plaines sèches et les déserts d’Asie centrale et hiverne en Asie du Sud. Elle est très difficile à distinguer de la sous-espèce I. p. elaeica de l’Hypolaïs pâle, même en main (lire Identification d’une Hypolaïs rama capturée en Israël). Elle est rare et accidentelle en Europe de l’Ouest.
On notera toutefois chez l’Hypolaïs rama :

  • des ailes proportionnellement plus courtes et une queue plus longue.
  • Un bec un peu plus court et plus étroit.
  • Un dessus plus brun et plus uniforme.
  • Une projection primaire nettement plus courte.
  • Une bordure blanche des rectrices externes de la queue plus large mais plus diffuse (voir notre schéma).
  • Un chant différent.

En outre, les mouvements de sa queue sont différents (ils sont orientés dans toutes les directions). Elle secoue en outre souvent ses ailes, mais pas nécessairement en même temps que la queue.

La distinguer de l’Hypolaïs bottée (Iduna caligata)

Comparaison de la longueur du bec de quatre espèces d'hypolaïs

Comparaison de la longueur du bec de quatre espèces d’hypolaïs du genre Iduna. L’Hypolaïs bottée a le bec le plus court et l’Hypolaïs obscure le plus long.
Schéma : Ornithomedia.com d’après K. Baker

L’Hypolaïs bottée est une petite espèce (longueur de 11 à 12,5 cm) nichant dans les broussailles basses dans les steppes et les pâturages des monts Oural (Russie) à l’ouest de la Chine et hivernant en Asie du Sud. Elle est rare et accidentelle en Europe de l’Ouest.
Elle se distingue de la sous-espèce I. p. elaeica de l’Hypolaïs pâle par :

  • une taille nettement inférieure et une silhouette rappelant un pouillot (Phylloscopus sp.).
  • Un bec nettement plus court.
  • Le dessus gris-brun.
  • Le dessous chamois.
  • Les rectrices externes de la queue bordées de pâle.
  • Les pattes plus claires (rosées).
  • Un chant distinct. 

Comme l’Hypolaïs rama, elle bouge rapidement la queue dans toutes les directions, souvent en agitant en même temps les ailes. 

Une vidéo montrant le mouvement typique de la queue de l’Hypolaïs pâle

L’Hypolaïs pâle est un oiseau très actif, qui se reconnaît notamment à son habitude d’agiter constamment sa queue vers le bas, notamment quand elle se nourrit. Cette caractéristique peut aider à la distinguer de l’Hypolaïs obscure, au plumage très proche, et de la Rousserolle effarvatte, à la silhouette comparable et au plumage plus chaud et plus sombre, mais avec laquelle une confusion est éventuellement possible quand les conditions d’éclairage sont défavorables.

Hypolaïs pâle (Iduna pallida) à Chypre le 13 mai 2018 : notez la queue constamment agitée vers le bas et le blanc visible sur les rectrices externes.
Source : George konstantinou – Cyprus Wildlife Tours

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