Une île reculée aux falaises spectaculaires et aux vertes prairies 

Situation de l'île de Toraigh ou Tory (Irlande)

Situation de l’île de Toraigh ou Tory (Irlande).
Carte : Ornithomedia.com

L’île de Toraigh (ou Tory en anglais) est située à environ 14 kilomètres de la côte nord-ouest du comté irlandais de Donegal. L’île tire son nom de l’irlandais  « tor » (rocher) ou de « torai » (pirate), en référence aux falaises et aux rochers qui ceinturent l’île et aux premiers habitants, les Fomoriens, des marins qui descendraient de Noé. Leur roi était nommé Balor, et à l’extrémité orientale de l’île se trouvent les ruines d’un fort portant son nom. 
Elle mesure environ quatre kilomètres de long et un de large et sa population (moins de 150 habitants) est répartie dans les quatre villages : An Baile Thoir (East Town), An Lár (Middletown), Úrbaile (Newtown) et An Baile Thiar (West Town).
L’île s’incline progressivement du nord au sud, la côte septentrionale étant bordée de falaises de quartzite déchiquetées et de lames rocheuses aux formes variées s’avançant dans l’océan Atlantique. Le littoral sud est plus bas, composé de grèves rocheuses et de plages de galets et de sable.
L’intérieur des terres, qui est presque entièrement dénué d’arbres, est occupé par des prairies pâturées et quelques cultures délimitées par des murets en pierre, ainsi que par des petits marais et des landes pratiquement. L’île compte aussi trois petits lacs, les lochs O’Dheas (salé), O’Thuaidh et O’Thoir. 

Vue du loch O'Thoir, sur l'île de Toraigh (Irlande)

Vue du loch O’Thoir, sur l’île de Toraigh (Irlande).
Photographie : Reza 85 / Wikimedia Commons

Parmi les sites historiques intéressants à ne pas rater, citons la tour ronde qui domine An Baile Thiar et qui  constitue le dernier vestige du monastère Saint-Columcille fondé au VIe siècle, l’intrigante croix de Tau datée du XIIe siècle,  la « pierre des vœux » (un rocher abrupt au sommet plat situé près du fort de Balor), la Móirsheisear (tombe des sept noyés), le phare  situé à l’extrémité ouest de l’île construit entre 1828 et 1832 et une torpille qui s’est échouée sur le rivage pendant la Seconde Guerre mondiale.

Accès et hébergements

L’île de Toraigh n’a pas d’aéroport, mais il existe des liaisons régulières par ferry depuis le port de Magheroarty (Machaire Rabhartaigh en gaélique), situé non loin de  Falcarragh. Les bateaux circulent quotidiennement tout au long de l’année, mais ils ne prennent pas de voitures. Le trajet dure environ 45 minutes en fonction de la météo. Pendant les mois d’hiver, les traversées peuvent être impossibles en raison de la mer agitée. Plus d’informations sont disponibles sur www.toryferry.com.
Un hélicoptère dessert également l’île toutes les deux semaines, pour transporter un médecin du continent au centre de santé de l’île, mais les places libres peuvent être vendues aux visiteurs. Plus d’informations sont disponibles sur toryisland.ie.
Il est conseillé de rester au moins une nuit sur l’île pour bien la découvrir, mais les restaurants et les hébergements sont peu nombreux : il existe un hôtel-restaurant (« Tory Island Hotel »), des gîtes (Bed&Breakfast) et un bar-restaurant (« The Social Club »). Il est aussi possible de camper sous certaines conditions. N’oubliez pas de prendre des vêtements imperméables, de bonnes chaussures de marche et de l’argent en espèces au cas où. Des informations pratiques sont disponibles sur www.theirishroadtrip.com

Les bons sites d’observation sur l’île de Toraigh

Carte de l'île de Toraigh ou Tory (Irlande) et bons sites d'observation

Carte de l’île de Toraigh ou Tory (Irlande) et bons sites d’observation : les numéros correspondent à ceux du texte.
Carte : Ornithomedia.com

L’île de Toraigh est petite et facile à explorer et plusieurs sites sont à privilégier pour observer les oiseaux (voir notre carte ci-contre) :
1- Près du phare, une colonie mixte de Goélands cendrés (Larus canus), de Sternes arctique (Sterna paradisaea) et pierregarin (S. hirundo) s’installe au printemps.
2- Le cap près de la croix (« cross ») de Tau  pour le passage des oiseaux marins.
3- L’étang (loch) Ó Thuaidh pour les laridés, limicoles et canards.
4- Le littoral sud-ouest pour les limicoles nicheurs et de passage.
5- Le loch Ó Dheas pour les laridés, limicoles et canards.
6- Les prairies autour de Tobar Mháire Alec pour le Râle des genêts (Crex crex) au printemps.
7- Les jardins du village d’An Baile Thiar (West Town) pour les passereaux rares durant les migrations.
8- L’ouest de la jetée (« pier ») d’An Baile Thiar pour le Crave à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax), les laridés et les limicoles.  
9- Les prairies (en vert sur la carte) à l’est d’An Baile Thiar pour le Râle des genêts, la Bécassine des marais (Gallinago gallinago), le Vanneau huppé (Vanellus vanellus) et le Chevalier gambette (Tringa totanus), tous nicheurs.
10- Les falaises au nord-est de l’île pour leurs colonies d’oiseaux marins, le Faucon pèlerin (Falco peregrinus), le Crave à bec rouge et le Grand Corbeau (Corvus corax).
11- Les jardins du village d’An Baile Thoir (East Town) pour les passereaux rares durant les migrations.
12- Les prairies autour d’An Baile Thoir (East Town) pour le Râle des genêts.
13- Le loch Thoir pour les laridés, limicoles et canards.

Des eaux marines qui accueillent le Requin pèlerin, la Loutre d’Europe et des cétacés

Vue des falaises de la côte nord de l'île de Toraigh (Irlande)

Vue des falaises de la côte nord de l’île de Toraigh (Irlande).
Photographie : Kay Atherton / Wikimedia Commons

La flore des prairies, des pelouses et des landes de Toraigh est variée, et au printemps et en été, les papillons y sont nombreux, notamment lors des afflux de Belles-Dames ou Vanesses des chardons (Vanessa cardui), venues du Sud. 
Les eaux qui baignent l’île, froides et oxygénées, permettent le développement de  grandes « forêts » de laminaires (Laminaria sp.). Elles sont visitées au début de l’été par des Requins pèlerins (Cetorhinus maximus), qui peuvent être vus depuis la côte. La Loutre d’Europe (Lutra lutra) est également régulière. Les falaises au nord de l’île constituent un bon site d’observation pour le Phoque gris (Halichoerus grypus) et d’autres mammifères marins, comme le Marsouin commun (Phocoena phocoena), le Grand Dauphin (Tursiops truncatus), le Petit Rorqual (Balaenoptera/Pterobalaena  acutorostrata), la Baleine (Rorqual) à bosse (Megaptera novaeangliae) et l’Orque épaulard (Orca orca).

Des colonies d’oiseaux marins et des Râles des genêts au printemps et en été

L’intérêt ornithologique de l’île de Toraigh est reconnu au niveau européen et elle forme, avec la zone marine l’entourant s’étendant sur 500 mètres à partir de la base de ses falaises, la « Tory Island Special Protected Area ». Grâce à ses prairies pâturées et à ses pratiques agricoles peu intensives, l’île abrite notamment une partie importante de la population irlandaise de Râles des genêts ( Crex crex) , avec une vingtaine de mâles chanteurs (lire La population irlandaise de Râles des genêts a augmenté de 35 % depuis 2018). Lors des soirées chaudes de mai et juin, on peut facilement les entendre, par exemple depuis la route principale près de West Town, entre la jetée et le bar « Social Club » et au-delà, et près d’East Town, entre ce village et Port an Dúin. Bien entendu, il faut rester sur les sentiers et garder son chien en laisse.

Râle des genêts (Crex crex)

Râle des genêts (Crex crex) chanteur sur l’île de Toraigh (Irlande) en mai 2025.
Photographie (extraite d’une vidéo) : Carr Camera Crew

Le Râle des genêts partage son habitat avec l’Alouette des champs (Alauda arvensis) (en déclin, avec une dizaine de chanteurs) et le Pipit farlouse (Anthus praetensis). Quelques couples de Craves à bec rouge (Pyrrhocorax pyrrhocorax) nichent sur l’île et se nourrissent dans les prairies pâturées et les pelouses rases littorales. 
Le Traquet motteux (Oenanthe oenanthe) et le Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes) construisent leur nid dans les murets, et quelques couples de Moineaux friquets (Passer domesticus) et d’Hirondelles de fenêtre (Delichon urbicum) nichent dans les secteur de la Tour ronde.
L’île de Toraigh est le site de reproduction des limicoles le plus important du nord-ouest de l’Irlande : le Bécasseau variable (Calidris alpina) (trois à cinq couples), le Grand Gravelot (Charadrius hiaticula) (deux couples), de l’Huîtrier pie (Himantopus ostralegus) (20 couples), le Vanneau huppé (plus de 20 couples), le Chevalier gambette (deux couples) et la Bécassine des marais (jusqu’à cinq couples) s’y reproduisent en effet. Ces espèces nichant au sol sont toutefois très sensibles aux dérangements et aux prédateurs. 
L’île accueille aussi une petite population de Sternes naines (Sternula albifrons) sur la côte sud-ouest, tandis qu’une colonie mixte composée de Goélands cendrés, de Sternes arctiques et pierregarins s’installe au nord-ouest du phare. Des Labbes parasites (Stercorarius parasiticus), non nicheurs patrouillent parfois au-dessus de ces oiseaux. L’Eider à duvet (Somateria mollissima) se reproduit aussi sur Toraigh.
Les falaises côtières accueillent le Faucon pèlerin et le Grand Corbeau, ainsi que d’importantes populations de Macareux moines (Fratercula arctica), de Guillemots de Troïl (Uria aalge), de Pingouins tordas (Alca torda), de Fulmars boréaux (Fulmarus glacialis) et de Mouettes tridactyles (Rissa tridactyla), auxquelles se joignent quelques dizaines de couples de Guillemots à miroir (Cepphus grylle), de Cormorans huppés (Gulosus aristotelis), de Goélands argentés (Larus argentatus), bruns (L. fuscus), marins (L. marinus) et cendrés. Une petite colonie mal connue d’Océanites tempête (Hydrobates pelagicus) serait aussi présente.

Des oiseaux rares à chercher en automne

Viréo aux yeux rouges (Vireo olivaceus)

Viréo aux yeux rouges (Vireo olivaceus) sur l’île de Toraigh (Irlande) le 9 octobre 2025.
Photographie : Aaron Long / Sa page X 

Plusieurs sites côtiers irlandais sont réputés pour l’observation en automne d’oiseaux rares venus d’Amérique du Nord ou de Sibérie, comme la péninsule de Loop Head (lire La péninsule de Loop Head, un site renommé pour trouver des oiseaux rares en automne), l’île de Cape Clear (lire L’île de Cape Clear, le Ouessant irlandais) et la Hold Head of Kinsale (lire The Old Head of Kinsale : oiseaux marins nicheurs et migrateurs). L’île de Toraigh, moins connue, a également un fort potentiel pour la recherche d’espèces occasionnelles. Par exemple, entre le 6 et le 9 octobre 2025, une Grive à joues grises (Catharus minimus) (une première donnée pour le pays) et trois Viréos aux yeux rouges (Vireo olivaceus) y ont été découverts, tandis que deux Arlequins plongeurs (Histrionicus histrionicus) évoluaient dans le port de Magheraroarty, situé juste en face de l’île et d’où partent les ferrys qui relient Toraigh au reste de l’Irlande.
D’autres raretés ont déjà été notées sur Toraigh, comme le Harfang des neiges (Bubo scandiacus) (un le 20 septembre 2009), le Pouillot boréal (Phylloscopus borealis), le Sizerin blanchâtre (Acanthis flammea hornemanni), les Hypolaïs pâle (Iduna pallida) et bottée (H. caligae) (une le 25 septembre 2003), les Rousserolles isabelle (Acrocephalus agricola) et des buissons (A. dumetorum) (une en octobre 2022), les Bruants rustique (Emberiza rustica), auréole (E. aureola) et nain (E. pusilla) et l’Alouette calandrelle (Calandrella brachydactyla).
D’autres espèces rares sont plus régulières, comme le Pouillot à grands sourcils (Phylloscopus inornatus) (parfois plusieurs oiseaux certains jours), les Plectrophanes (ou Bruants) lapon (Calcarius lapponicus) et des neiges (Plectrophenax nivalis) ou le Roselin cramoisi (Carpodacus erythrinus). 

Grive à joues grises (Catharus minimus)

Grive à joues grises (Catharus minimus) sur l’île de Toraigh (Irlande) le 9 octobre 2025, une première pour le pays !
Photographie : Sean Gibson/ Sa page X

Les buissons, les arbres et les arbustes étant rares sur l’île, la plupart de ces passereaux sont à rechercher dans les jardins des quatre villages : An Baile Thoir (East Town), An Lár (Middletown), Úrbaile (Newtown) et An Baile Thiar (West Town).
Les rives des trois plans d’eau sont aussi à explorer, car des limicoles accidentels y sont parfois notés, comme le Bécasseau tacheté (Calidris melanotos) et le Chevalier à pattes jaunes (Tringa flavipes) (un le 8 septembre 2007).
Le passage des oiseaux marins (labbes, puffins, sternes, fous, etc.) peut être observé depuis les falaises du nord et lors de la traversée en ferry. 
La variété des migrateurs est remarquable sur l’île en automne, et dans un moindre mesure au printemps, comme en témoigne l’observation d’un Plongeon à bec blanc (Gavia adamsii) le 13 mai 2018. On peut avoir une idée de cette diversité en allant sur le site web Irish Birding et en choisissant « Donegal » dans le filtre « county » (comté).

Un autre site à visiter dans les environs, le Lough Swilly

Sur la côte du comté de Donegal, à une dizaine de kilomètres à l’est de Toraigh, le Lough (« lac ») Swilly mérite aussi une visite durant les migrations et en hiver. Il s’agit d’un fjord d’origine glaciaire s’enfonçant entre les péninsules d’Inishowen et de Fanad. Il est réputé pour l’observation des cétacés et surtout des anatidés (oies et cygnes) et des limicoles. Il est vaste, mais plusieurs secteurs méritent particulièrement votre attention, comme le Blanket Nook Wildfowl Sanctuary (voir sa localisation) et la Inch Wildfowl Reserve (voir sa localisation). 

Un Râle des genêts filmé sur l’île de Toraigh

Râle des genêts (Crex crex) filmé sur l’île de Toraigh (Irlande) 
Source : Ciaran Kelly Photography

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