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Le Maasvlakte (Pays-Bas), un nouvel « Eldorado » pour l’observation des oiseaux
Introduction
Le port de Rotterdam (Pays-Bas) est le plus vaste et le plus actif d’Europe : il mesure 42 km de long et couvre 124 km². Pour faire face à la croissance de son trafic, il est en constant développement, avec le creusement de nouveaux bassins et la construction de zones industrielles, de terre-pleins et de voies de communication. Pour maintenir son rang, la création d’une extension de près de 2 000 hectares gagnée sur la mer, appelée Maasvlakte 2, que l’on pourrait traduire par « seconde partie de la plaine de la Meuse », a débuté en 2004, et elle a été inaugurée en 2013.
Elle a été créée dans la partie maritime du delta du Rhin et de la Meuse (Voordelta), une zone humide d’un grand intérêt écologique et a eu de profondes répercutions écologiques sur la faune et la flore. Pour que les travaux puissent être réalisés, l’Union Européenne a exigé que des mesures compensatoires, censées réduire l’impact écologique de cet aménagement, soient prises : environ 25 000 hectares de fonds marins ont été protégés et 750 hectares « laissés » à la nature (dunes, plages, vasières, etc.).
Même si ces actions ne font pas l’unanimité parmi les défenseurs de la nature et les biologistes, elles ont tout de même permis de faire d’ores et déjà du Maasvlakte 2 une zone intéressante pour l’observation des oiseaux migrateurs, une attractivité favorisée par sa situation géographique : il constitue en effet une importante avancée dans la mer du Nord.
Grâce à Marc Fasol (visitez sa galerie de photos), nous vous proposons une présentation du Maasvlakte et de ses bons sites pour l’observation des oiseaux.
Abstract
The port of Rotterdam (Netherlands) is the largest and busiest in Europe: it is 42 km long and covers 124 km². To accommodate the growth of its traffic, it has been in constant development, with the digging of new basins and the construction of industrial areas of embankments and communications routes. To maintain its rank at world level, the creation of an extension of nearly 2,000 hectares reclaimed from the sea, called « Maasvlakte 2 », began in 2004. This area was inaugurated in 2013.
Maasvlakte 2 was created in the maritime part of the Rhine-Meuse delta (Voordelta), a wetland of great ecological interest, and it had profound ecological repercussions on the fauna and flora. For the work to be carried out, the European Union required that compensatory measures, intended to reduce the ecological impact of the extension, be taken: approximately 25,000 hectares of seabed was protected and 750 hectares was dedicated to nature (dunes, beaches, mudflats, etc.).
Even if these actions are not unanimous among nature defenders and biologists, they have nevertheless made it possible to make Maasvlakte 2 an interesting area for observing migratory birds, an attractiveness which was favored by its geographical location: it indeed forms an important advance in the North Sea.
Thanks to Marc Fasol (visit his gallery), we propose to you a presentation of the Maasvlakte and its good sites for birdwatching.
Le Maasvlakte, une zone artificielle au fort potentiel ornithologique
Situation du Maasvlakte (Pays-Bas). |
Le Maasvlakte est un gigantesque projet d’ingénierie civile, le plus important des Pays-Bas depuis le fameux “Plan Delta”, un ensemble d’infrastructures composé d’un barrage anti-inondations marines et d’un ensemble de digues et de voies de communication dont les travaux ont duré quarante ans (1958-1997).
Le Maasvlakte a été réalisé en deux phases : la première a débuté dans les années 1970, tandis que la seconde, appelée Maasvlakte 2, a été lancée en 2004. Sa réalisation a nécessité l’édification d’une digue de forme circulaire, à l’intérieur de laquelle près de 200 millions de mètres cubes de sédiments marins issus de la mer du Nord ont été injectés grâce à des pompes puissantes. Avec un agrandissement de près de 2 000 hectares à l’ouest du Maasvlakte 1, le Maasvlakte 2 a pour objectif de tripler la capacité d’accueil et de développer les activités industrielles et commerciales du port de Rotterdam.
Il a profondément transformé l’écosystème marin littoral et la partie maritime du delta de la Meuse et du Rhin, connu sous le nom de Voordelta ou Pré-delta, qui se caractérise notamment par de nombreux bancs de sable peu profonds exondés à marée basse.
La zone étant inscrite dans le réseau Natura 2000, le lancement des travaux du Maasvlakte 2 a nécessité plusieurs études d’impact. L’Union Européenne les a finalement autorisés à condition que les surfaces naturelles détruites et la biodiversité perdue soient « contrebalancées » par des mesures compensatoires : 750 hectares ont ainsi été consacrés à la faune et à la flore.
Comme elle s’avance loin en mer, comme l’avant-port de Zeebruges en Belgique (lire Où observer les oiseaux dans le port de Zeebruges ?), cette extension constitue un excellent poste d’observation pour le passage des oiseaux pélagiques et pour l’accueil des passereaux migrateurs au printemps et surtout en automne, épuisés par leur trajet au-dessus de la mer du Nord ou cherchant une étape le long de la côte.
Des raretés y sont observées chaque année.
La zone est également intéressante durant la période de nidification : on y trouve par exemple une très grande colonie mixte (de plusieurs milliers de couples) de Goélands argentés (Larus argentatus) et bruns (L. fuscus), de Mouettes rieuses (Chroicocephalus ridibundus) et mélanocéphales (Ichthyaetus melanocephalus). Une colonie de Spatules blanches (Platalea leucorodia) s’est aussi installée (30 couples en 2021), et de nombreux nids d’Avocettes élégantes (Recurvirostra avosetta) y sont visibles.
Par ailleurs, à marée basse, plusieurs bandes de Phoques gris (Halichoerus grypus) et veaux-marins (Phoca vitulina) se reposent sur les bancs de sable.
Une nouvelle plage née à la suite de travaux a par ailleurs un grand intérêt paléontologique : en s’y promenant après une tempête, on peut en effet trouver des fossiles de l’époque glaciaire, raison pour laquelle elle a été surnommée la “plage aux mammouths”.
Comme c’est souvent le cas aux Pays-Bas, une zone artificielle est ainsi devenue un site remarquable pour l’observation des oiseaux (lire Observer les oiseaux près de Stellendam).
1- Les bons sites d’observation du Maasvlakte 2 : l’Oostvoornse Meer
Pour rejoindre le Maasvlakte depuis Rotterdam, il faut emprunter l’autoroute A15 (“Europaweg”), puis prendre la sortie numéro 8 vers Oostvoorne. Suivre ensuite la route secondaire parallèle appelée “Noordoever Oostvoornse Meer” et longer l’Oostvoornse Meer, un grand lac assez profond créé lors de la construction de deux barrages dans les années 1950-1960. Se garer ensuite au niveau de l’intersection entre les routes “Prinses Maximaweg” et “Noordzee Boulevard”. On peut alors débuter l’exploration du secteur (et plus largement du Maasvlakte 2) en voiture ou à bicyclette (recommandé) : le réseau des pistes cyclables est en effet dense et sécurisé.
L’Oostvoornse Meer est intéressante pour l’observation des oiseaux aquatiques, et elle est équipée de plusieurs palissades d’observation. En hiver, les Cygnes chanteurs (Cygnus cygnus) y sont réguliers et évoluent parmi les groupes de harles et de grèbes. Les Grèbes castagneux (Tachybaptus ruficollis) sont souvent notamment visibles de près et donc plutôt faciles à photographier. Vérifiez également les berges car on y voit assez souvent le Martin-pêcheur d’Europe (Alcedo atthis) à la recherche d’une bonne prise.
Les buissons proches du lac sont intéressants pour observer les passereaux migrateurs (grives, fauvettes, pouillots, gobemouches, etc.), et des raretés sont possibles, comme cette jeune Pie-grièche isabelle (Lanius isabellinus) trouvée fin octobre 2022 (lire Identification d’une probable jeune Pie-grièche isabelle en Vendée en novembre 2017).
2- La Vogelvallei, la “vallée aux oiseaux”
En continuant un peu plus loin le long de la “Prinses Maximaweg”, on atteint un site « naturel » un peu particulier et qui mérite le détour, la Vogelvallei ou « vallée aux oiseaux”. D’une superficie de 21 hectares, elle est entièrement d’origine artificielle. Depuis un belvédère, on a une bonne vue sur trois îlots, chacun d’entre eux présentant des caractéristiques différentes (hauteur, végétation et substrat) afin de satisfaire les exigences d’un maximum d’espèces d’oiseaux. Ils sont entourés de canaux pour attirer différentes espèces de canards de surface et plongeurs et de limicoles.
Vue de l’observatoire et du mur à Hirondelles de rivage (Riparia riparia) dans la Vogelvallei, dans le Maasvlakte 2 (Pays-Bas) (cliquez sur la photo pour l’agrandir). |
Le Tadorne de Belon (Tadorna tadorna) et la Bernache nonnette (Branta leucopsis), une espèce férale aux Pays-Bas, nichent au sein d’une grande colonie mixte de Goélands bruns et argentés et de Mouettes rieuses et mélanocéphales. Les Spatules blanches forment également une petite colonie (30 couples en 2021) installée dans les roseaux. De nombreux nids d’Avocettes élégantes sont visibles depuis la palissade, même s’ils sont un peu difficiles à photographier en raison de leur éloignement. Le Tarier pâtre (Saxicola rubicola), la Gorgebleue à miroir blanc (Luscinia svecica cyanecula) et le Petit Gravelot (Charadrius dubius) sont nicheurs.
Le poste d’observation a été construit sur un socle en béton muni d’orifices qui accueille une très belle colonie d’Hirondelles de rivage (Riparia riparia) (lire Deux constructions originales pour aider les martinets et les Hirondelles de rivage). Elles sont alors très faciles à photographier quand elles se posent.
3- La plage et les vasières du Slikke van Voorne devant le bassin Slufter
Faire ensuite demi-tour et prendre le Noordzeeboulevard. Stationner en haut de la côte devant une palissade décorée de silhouettes d’oiseaux en vol. Le Slufter, invisible depuis la route, est un grand bassin de décantation créé afin de stocker les boues de dragage du chenal portuaire : il accueille beaucoup d’oiseaux, mais c’est la plage et les vasières du Slikke van Voorne en contrebas qui retiendra votre attention : un affût permet d’avoir une bonne vue sur cette zone. Une quantité phénoménale de limicoles, de laridés et de Grands Cormorans (Phalacrocorax carbo) s’y rassemblent, les Sternes pierregarin (Sterna hirundo), caugek (Thalasseus sandvicensis) et naine (Sternula albifrons) sont communes au printemps, et plusieurs passereaux chanteurs sont visibles dans la végétation buissonnante, dont la Gorgebleue à miroir blanc.
Des Phoques gris se reposent à marée basse sur les bancs de sable.
4- Le Vogeltelpost, un bon site pour observer le passage des oiseaux de mer
Passage de Fous de Bassan (Morus bassanus) depuis le Vogeltelpost, dans le Maasvlakte 2 (Pays-Bas) (cliquez sur la photo pour l’agrandir). |
Poursuivre sur le Noordzeeboulevard, qui contourne le bassin Slufter, puis suivre le Maasvlakteboulevard pour déboucher sur un carrefour avec la Maximaweg : prendre alors à gauche (une piste cyclable longe la route). Après environ 4 km, on arrive au Vogeltelpost, une palissade d’observation en forme de rose des vents à l’abri des intempéries. Par fort vent de Nord-ouest, le passage des oiseaux marins, principalement les Fous de Bassan (Morus bassanus), les labbes et les plongeons, notamment le Plongeon arctique (Gavia arctica), est souvent intéressant. Compte tenu de la distance, une longue-vue sera utile. Il faut aussi observer les passereaux migrateurs dans les buissons du massif dunaire.
5- La Stuifdijk, la « digue des raretés »
Reprendre votre trajet le long de la digue jusqu’au Maasvlakte Olie Terminal (terminal pétrolier) : elle s’arrête là où la Meuse et le nouveau canal portuaire se jettent dans la mer du Nord. La Stuifdijk est la partie de la digue qui s’étend au-delà du café ‘Balkon van Europa », et elle est particulièrement intéressante durant les migrations car les passereaux ont l’habitude de se réfugier dans les massifs denses d’Argousiers (Hippophae rhamnoide) qui l’ont colonisée.
Des espèces rares comme le Pouillot à grands sourcils (Phylloscopus inornatus) ont déjà été notées parmi les migrateurs plus communs comme le Tarier des prés (Saxicola rubetra), la Fauvette babillarde (Curruca curruca), le Roitelet triple-bandeau (Regulus ignicapilla), le Rougequeue à front blanc (Phoenicurus phoenicurus) ou le Gobemouche noir (Ficedula hypoleuca). Au printemps, le Rossignol philomèle (Luscinia megarhynchos) et le Tarier pâtre sont nicheurs.
Tarier de Sibérie (Saxicola maurus) de premier hiver sur la Stuifdijk dans le Maasvlakte (Pays-Bas), le 23 octobre 2021 (cliquez sur la photo pour l’agrandir). |
Non loin de là, le Luzerneveld est une étendue sèche à la végétation rase qui s’étend devant la caserne des pompiers (la Brandweer Kazerne) : des pipits et des bruants, dont parfois le Bruant ou Plectrophane lapon (Calcarius lapponicus), y font une halte. Au printemps, c’est un site de nidification du Petit Gravelot et de l’Huîtrier pie (Haematopus ostralegus).
Longer ensuite la petite baie d’Edison jusqu’au café-terrasse “Balkon van Europa”, puis parcourir la digue sur quelques centaines de mètres. Plusieurs espèces peu communes peuvent être observées sur les talus envahis de buissons, comme le Torcol fourmilier (Jynx torquilla), la Huppe fasciée (Upupa epops) et le Merle à plastron (Turdus torquatus). Des raretés ont déjà été découvertes : citons entre autres un Tarier de Sibérie (Saxicola maurus) le 23 octobre 2021 (lire Identifier les Tariers pâtre, de Sibérie, de la Caspienne et de Stejneger), un Accenteur montanelle (Prunella montanella), qui a attiré des centaines d’observateurs, le 21 octobre 2016 (Afflux d’Accenteurs montanelles en Europe du Nord en octobre 2016), un Bruant à gorge blanche (Zonotrichia albicollis) le 27 octobre 2019, un Junco ardoisé (Junco hyemalis) le 1er mai 2021, un Coulicou à bec jaune (Coccyzus americanus) qui, exténué, a fini son interminable traversée en se noyant tristement sur l’estran, le 12 octobre 2022, ou encore un Pouillot à deux barres ou à pattes sombres (Phylloscopus/Seicercus plumbeitarsus) en octobre 2021 (lire Distinguer le Pouillot à pattes sombres ou à deux barres des autres pouillots ayant une ou deux barres alaires).
D’autres photos du Maasvlakte (oiseaux et paysages)
Voici ci-dessous d’autres photos prises dans le Maasvlakte (Pays-Bas) par Marc Fasol :
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Compléments
Contact
Marc Fasol – Courriel : marc.fasol@icloud.com – Sa galerie de photos : www.oiseaux.net/photos/marc.fasol/
Dans la galerie Observations d’Ornithomedia.com
Sterne caspienne (Hydroprogne caspia)
Dans la boutique Observations d’Ornithomedia.com
À lire sur le web
- Le site web du projet Droomfonds Haringvliet : https://haringvliet.nu
- Le site web Vogelkijkhut.nl : https://vogelkijkhut.nl
- Le site web Zeeland : www.vvvzeeland.nl
Ouvrages recommandés
- ANWB Vogelkijkgids Nederland de Boris Everwijn
- Birds of the Netherlands (Nature Travel Guide) de Duncan James
- Le guide Ornitho de L. Svensson et al
Sources
- Birdingplaces. Noordzeeboulevard – Tweede Maasvlakte. www.birdingplaces.eu
- Birdingplaces. Vogelvallei – Tweede Maasvlakte. www.birdingplaces.eu
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