Les caroténoïdes se conservent moins que les mélanines

Spécimen d'Anchiornis huxleyi

Spécimen fossilisé du dinosaure  Anchiornis huxleyi appartenant au clade des Avaliens présentant des empreintes de plumes. Des restes de mélanosomes ont été trouvées dans celles-ci après une analyse au microscope électronique par balayage.
Photographie : Kumiko / Wikimedia Commons

Les mélanines et les caroténoïdes sont les principaux pigments à l’origine des couleurs des oiseaux. Les premiers sont considérés comme les plus anciens, car des mélanosomes, les organites intracellulaires à l’intérieur desquels ils sont fabriqués, ont été trouvés dans des fossiles d’oiseaux préhistoriques et de dinosaures (lire Les couleurs spectaculaires retrouvées d’un dinosaure à plumes).
Contrairement aux mélanines, qui sont synthétisées par les oiseaux, les caroténoïdes sont obtenus à partir de leur alimentation. Ils sont ensuite métabolisés puis déposés dans leurs plumes, leur peau et les écailles de leurs pattes, mais aussi dans les gouttelettes huileuses sphériques des cônes de leur rétine (un point commun avec les tortues), des structures qui jouent un rôle important dans l’amélioration de la détection et de la discrimination des teintes (lire La vision des oiseaux). Outre la coloration des tissus et la vision, les caroténoïdes sont impliqués dans les processus physiologiques, la réponse immunitaire et le développement.
L’histoire évolutive du rôle de ces pigments dans la production des couleurs est beaucoup moins connue que celle des mélanines, car ils n’ont jamais été détectés dans des fossiles de vertébrés, même si l’existence de xanthophores, les cellules qui les synthétisent, avait été suggérée dans celui d’un serpent. Du fait de leur structure chimique fragile, ils se conservent très mal.
Si l’effet des caroténoïdes sur la coloration de la peau est rapide (parfois 48 heures après avoir mangé des aliments en contenant), il est plus lent pour les plumes, car il faut attendre leur renouvellement par la mue (lire Comprendre la mue chez les oiseaux) : à l’échelle de l’évolution, les mécanismes de dépôt des caroténoïdes pourraient ainsi d’abord être apparus dans les tissus vascularisés avant de concerner les structures kératiniques.
Le type de régime alimentaire a un impact variable sur la coloration des oiseaux, les aliments les plus concentrés en caroténoïdes étant généralement à l’origine des teintes les plus intenses. Il existe toutefois des différences selon les tissus, les structures kératiniques, qui sont renouvelées plus lentement, pouvant nécessiter des apports plus élevés.
Chez les oiseaux modernes, 66 composés caroténoïdes ont été décrits chez 33 % des ordres existants. On estime que la coloration des plumes ayant pour origine l’ingestion de ces pigments existait déjà chez des oiseaux du Paléocène (de – 66 à- 56 millions d’années), c’est-à-dire au début du Cénozoïque (lire Les oiseaux préhistoriques géants du Cénozoïque).
La potentielle distribution de la coloration des tissus issue de ces pigments dans les groupes disparus des archosaures, le clade qui comprend les oiseaux et les crocodiliens actuels et leurs ancêtres, ainsi que les dinosaures aviens et non-aviens et les ptérosaures, n’avait jusqu’à présent jamais été étudiée à l’aide de méthodes comparatives phylogénétiques (= étudiant le degré de parenté entre les êtres vivants et donc leur évolution). Il n’y a jamais eu non plus de reconstructions phylogénétiques à grande échelle étudiant l’évolution de l’association entre la coloration due aux caroténoïdes et les différents types de tissus.

La méthodologie de l’étude

Sarah N. Davis et Julia A. Clarke ont étudié la coloration des tissus due aux caroténoïdes chez les oiseaux actuels, à l’exception des passereaux (n = 4022), mais aussi chez des espèces appartenant à douze groupes du clade des archélosaures, qui comprend les archosaures et les tortues.
Pour un échantillon d’oiseaux (n = 61), elles ont noté la coloration de différents tissus (iris, kératine du bec, peau nue du corps et des pattes, écailles et plumes), sa stabilité et son lien avec leur régime alimentaire. Elles se sont basées sur des photos et sur les résultats d’autres études.
Les couleurs prises en compte sont celles associées avec certitude aux caroténoïdes, principalement le rouge, l’orange et le jaune.
Les passereaux n’ont pas été inclus car les auteurs avaient pour but de comprendre l’évolution de l’expression des caroténoïdes : or cet ordre est le plus récent et donc le plus éloigné des origines des oiseaux. Les familles des Tyrannosauridés et des Anchiornithidés (lire Anchiornis, un dinosaure à plumes plus ancien que l’Archeopteryx) ont été sélectionnées car des tissus fossilisés bien conservés ont été trouvés chez ces dinosaures (lire Des tyrannosaures morts d’une maladie aviaire).
Pour évaluer l’expression possible des caroténoïdes dans les groupes éteints (dinosaures aviens et non-aviens et ptérosaures), les auteurs ont réalisé un arbre phylogénétique et utilisé les méthodes probabilistes de maximum de parcimonie et de maximum de vraisemblance. 

Les principaux résultats de l’étude

Tissus colorés par les caroténoïdes chez plusieurs groupes d'animaux modernes et éteints

Tissus colorés par les caroténoïdes chez plusieurs groupes d’animaux modernes et éteints (cliquez sur le schéma pour l’agrandir).
Source : Sarah N. Davis

Sur les 4 022 espèces d’oiseaux modernes prises en compte, 54 % ont des tissus colorés (peau, bec, pattes et/ou plumes) grâce aux caroténoïdes. La reconstruction phylogénétique a permis d’estimer que les ancêtres communs des oiseaux, des dinosaures aviens et non-aviens et des tortues avaient globalement 50 % de probabilité d’avoir eu des tissus colorés grâce à ces pigments : il n’a par contre pas été possible d’estimer si c’était aussi le cas des plumes.
Une corrélation a été trouvée entre les couleurs dues aux caroténoïdes des structures kératiniques et des plumes, ainsi qu’entre un régime alimentaire riche en végétaux et ces teintes.
Bien qu’il existe encore très peu (voire pas) de preuves directes de l’existence d’une coloration des tissus liée aux caroténoïdes dans des fossiles de vertébrés, de plus en plus d’informations sont désormais disponibles concernant les structures tégumentaires des dinosaures grâce aux découvertes effectuées au cours des trente dernières années. On sait par ailleurs que les groupes végétaux qui dominaient jusqu’à l’arrivée des plantes à fleurs au Jurassique supérieur avaient une teneur en caroténoïdes nettement inférieure à celle des angiospermes, et que les régimes alimentaires riches en végétaux se sont progressivement développés chez les avialiens, le clade regroupant les dinosaures ayant développé la musculature adéquate pour voler.

L’interview de Sarah N. Davis

1- La présence et la distribution des couleurs liées aux caroténoïdes chez les dinosaures aviens n’avaient pas été étudiées jusqu’à présent à l’aide de méthodes comparatives phylogénétiques : pour quelle raison selon vous ?

Flamant rose (Phoenicopterus roseus)

La coloration du plumage du Flamant rose (Phoenicopterus roseus) provient en grande partie des caroténoïdes que l’on trouve dans son alimentation (algues et crustacés).
Photographie : Eric Canadas

Sarah N. Davis : des études ont déjà été menées pour comprendre le rôle des caroténoïdes dans les couleurs de groupes spécifiques de vertébrés, comme les oiseaux ou les lézards, ou au sein d’un même type de tissus, comme les plumes. Elles ont rendu notre travail possible et ont grandement influencé la façon dont nous avons abordé les hypothèses et la collecte des données pour étudier l’expression de ces pigments chez les dinosaures et les oiseaux préhistoriques. La collecte et la compilation des informations pour de nombreux groupes prennent toutefois beaucoup de temps. Dans le cadre de mon doctorat, il m’a fallu ainsi quatre ans, avec l’aide de trois étudiants de premier cycle, pour collecter les données sur les oiseaux modernes (4 022 espèces) utilisées dans notre étude. Même si celle-ci a permis de répondre à plusieurs questions, le temps qu’elle a demandé explique certainement pourquoi des travaux similaires à très grande échelle n’ont pas encore été menés par ailleurs.

2- On estime qu’une grande partie des oiseaux du Cénozoïque (= l’ère géologique allant de l’extinction des dinosaures à nos jours) avait des plumages colorés grâce aux caroténoïdes : auriez-vous des exemples ?

Sarah N. Davis : au Cénozoïque, tous les groupes d’oiseaux que nous connaissons aujourd’hui existaient déjà, ainsi donc que leurs couleurs, comme le rose des flamants, le rouge et le jaune des pics, ou les jaunes, les rouges et les roses des passereaux chanteurs.

3- Les oiseaux et les tortues sont les seuls groupes reptiliens vivants connus pour avoir des gouttelettes rétiniennes, qui jouent un rôle dans la détection des couleurs, et des études génétiques ont suggéré qu’un événement de duplication aurait pu se produire à la base du groupe des archélosaures (= qui regroupe les oiseaux, les dinosaures, les ptérosaures, les tortues et les crocodiliens) : cela signifie-t-il que les dinosaures aviens avaient aussi une bonne vision ?

Sarah N. Davis : oui, car il est probable que les dinosaures aviens du Mésozoïque avaient ces gouttelettes dans leur rétine, comme les oiseaux actuels (lire L’évolution des oiseaux au Jurassique et au Crétacé). Les scientifiques qui ont étudié la distribution de ces structures ont en effet suggéré qu’elles auraient pu être à l’origine de l’excellente vision des couleurs des oiseaux modernes, et qu’elles auraient pu être déjà présentes chez leurs précurseurs. La capacité à distinguer les couleurs aurait par ailleurs pu favoriser l’apparition de la diversité des plumages des oiseaux.

4- Vous avez étudié le rôle des caroténoïdes dans la coloration de plusieurs types de tissus chez les oiseaux modernes et dans plusieurs groupes éteints : comment avez-vous choisi les fossiles de votre étude ?  

Mésange bleue (Cyanistes caeruleus)

Le jaune du ventre de la Mésange bleue (Cyanistes caeruleus) provient des caroténoïdes qu’elle trouve dans son alimentation.
Photographie : Bruno Suffice

Sarah N. Davis : dans notre étude, nous avons collecté uniquement des données disponibles chez des animaux vivants (oiseaux, crocodiliens et tortues). En effet, la préservation des caroténoïdes est très mauvaise et il n’existe donc actuellement aucun fossile à partir duquel nous aurions pu collecter des informations à leur sujet. Afin de comprendre si ces composés chimiques étaient aussi présents chez les dinosaures et les oiseaux préhistoriques, nous avons dû utiliser la technique du « bracketing » phylogénétique, une méthode d’inférence (ou de raisonnement par déduction) basée sur l’étude des positions d’un organisme dans un arbre évolutif afin de rechercher des traits que des animaux éteints auraient pu partager avec leurs descendants évolutifs modernes. Nous avons essayé de voir ce qui était biologiquement possible chez les dinosaures, en mettant l’accent sur les théropodes, qui, selon nous, étaient les plus susceptibles d’avoir ce type de coloration.

5- Pour contextualiser la coloration possible des lignées éteintes, vous avez utilisé les méthodes probabilistes de maximum de parcimonie et de vraisemblance et les modèles des taux égaux pour toutes les transitions (ER) et symétriques avant et arrière (SYM). Pourriez-vous nous présenter brièvement ces deux modèles ? Sont-ils fréquemment utilisés dans l’étude des fossiles ?

Sarah N. Davis : ces deux modèles permettent de calculer différemment les probabilités de présence de certaines caractéristiques chez des espèces disparues. Nous les avons utilisés parce qu’ils étaient bien adaptés au traitement des données dont nous disposions, et leur concordance nous a permis de conforter nos résultats.

6- Vous avez trouvé une relation entre l’apport en caroténoïdes dans la nourriture et les parties du corps et les tissus colorés : cela signifie-t-il que certaines espèces recherchent spécifiquement des aliments riches en caroténoïdes ?

Vautour percnoptère (Neophron percnopterus)

La couleur jaune de la peau nue de la face du Vautour percnoptère (Neophron percnopterus) provient des excréments de mammifères herbivores qu’il ingère.
Photographie : Jean Morillon

Sarah N. Davis : les reptiles et les oiseaux modernes présentant une coloration à base de caroténoïdes ont en effet un régime alimentaire contenant ces pigments. Certaines espèces consomment ainsi des « compléments alimentaires », comme le Vautour percnoptère (Neophron percnopterus) qui mange les excréments des herbivores pour obtenir ces composés qui sont à l’origine de la couleur jaune de leur face. Ces pigments ont aussi des effets positifs sur leur santé : ils ne sont donc pas uniquement consommés pour la production de couleurs. Il est tout à fait possible que certains dinosaures aient mangé des aliments riches en caroténoïdes.

7- La préservation des molécules pigmentaires dans les fossiles est mauvaise, et les caroténoïdes n’ont jamais été détectés dans des fossiles de vertébrés. Vous avez émis l’hypothèse qu’il était peu probable que l’existence de caroténoïdes dans les plumes ne soit pas associée à leur présence dans d’autres tissus, comme la peau ou la rhamphothèque (bec). Cela signifie-t-il qu’on ne peut pas déterminer si les oiseaux préhistoriques et les dinosaures aviens auraient pu avoir des plumes rouges ou jaunes sans trouver de traces de caroténoïdes dans leurs fossiles ? 

Sarah N. Davis : compte tenu de notre compréhension actuelle et des preuves fossiles, c’est en effet le cas. Malheureusement, aucune preuve directe d’une coloration issue des caroténoïdes n’a été trouvée dans un fossile d’oiseau préhistorique ou de dinosaure, et c’est pourquoi nous avons mené notre étude pour essayer de déterminer, par l’étude des colorations des oiseaux modernes et par l’utilisation de méthodes probabilistes et phylogénétiques, les couleurs possibles de ces animaux disparus, en attendant qu’une preuve directe puisse un jour, espérons-le, être trouvée. Cependant, d’autres pigments se conservent bien mieux que les caroténoïdes, comme les mélanines, et nous disposons de plusieurs fossiles de dinosaures et d’oiseaux préhistoriques présentant des traces de coloration à base de mélanines dans leurs plumes et leurs tissus mous, ce qui nous a permis de découvrir qu’ils avaient des colorations brunes, grises, noires et irisées.

8- D’après votre article, les plumes des dinosaures aviens muaient probablement de façon saisonnière et les écailles de leurs tarses et le tégument corné de leur bec poussaient certainement de manière continue, comme chez les tortues et les oiseaux modernes : cela signifie-t-il que ces deux processus de renouvellement n’auraient que peu ou pas changé en plusieurs millions d’années ?

Microraptor gui

Reconstitution de l’apparence et taille comparée de Microraptor gui, un dinosaure ailé qui vivait en Chine il y a 120 millions d’années : ses plumes muaient probablement comme celles des oiseaux modernes.
Dessin : Ornithomedia.com

Sarah N. Davis : c’est une excellente question ! Pour autant que nous puissions en juger, ces processus de renouvellement sont en effet probablement très similaires chez les oiseaux modernes et préhistoriques et chez les dinosaures aviens, les mécanismes de croissance des tissus ayant tendance à être relativement comparables entre les groupes de vertébrés.

9-  Vous avez émis l’hypothèse que les écailles des tarses de nombreux dinosaures aviens n’étaient pas colorées grâce aux caroténoïdes : est-ce parce que les mécanismes de dépôt de ces pigments sont plus fréquents dans des tissus vascularisés que dans les structures kératiniques ?

Sarah N. Davis : sur la base de nos connaissances sur la façon dont ces pigments se déposent et d’après nos estimations basées sur notre méthode de reconstruction phylogénétique, nous pensons en effet que les colorations à base de caroténoïdes sont probablement d’abord apparues dans les tissus qui se renouvellent plus souvent, comme les tissus cutanés mous, que dans les tissus kératinisés. Ainsi, la peau autour des écailles de ces dinosaures était plus susceptible d’être colorée que les écailles elles-mêmes.

10- La disponibilité alimentaire des caroténoïdes doit être prise en considération pour estimer la coloration des tissus (autres que les plumes) des oiseaux préhistoriques car chez les espèces actuelles, des régimes riches en pigments sont associés à la coloration de différentes parties du corps. Si des preuves d’un régime alimentaire riche en caroténoïdes étaient trouvées pour des fossiles de précurseurs des oiseaux, cela plaiderait-il en faveur d’une coloration jaune ou rouge de leurs plumes, de certaines zones de peau nue ou de leurs structures kératiniques ?

Anchiornis huxleyi

Le plumage reconstitué du dinosaure à plumes Anchiornis huxleyi du Jurassique ressemble à celui d’un mâle de Pic à bec d’ivoire (Campephilus principalis). Il avait peut-être une huppe et un bec colorés grâce aux caroténoïdes.
Schéma : Ornithomedia.com d’après Michael DiGiorgio /Yale University

Sarah N. Davis : si nous pouvions reconstituer le régime alimentaire d’un dinosaure ou d’un oiseau préhistorique, cela pourrait en effet certainement permettre d’estimer s’ils avaient des tissus colorés grâce aux caroténoïdes. Par exemple, si nous avions la preuve qu’un dinosaure théropode était principalement carnivore, mangeant de petits vertébrés qui ont une très faible teneur en caroténoïdes, alors il serait très peu probable que cet animal ingérait suffisamment de ces pigments pour que cela se voie dans les couleurs de leurs tissus. Nous avons des preuves directes que de nombreux petits dinosaures théropodes et précurseurs des oiseaux mangeaient des matières végétales, dont la teneur en caroténoïdes était élevée, ce qui signifie qu’il y avait une plus grande probabilité qu’ils aient eu des tissus colorés grâce aux caroténoïdes. Cela ne signifie toutefois pas qu’ils avaient ces colorations de façon certaine, car il existe de nombreux oiseaux modernes qui mangent des caroténoïdes par leur alimentation et qui n’ont pas de couleurs jaunes, rouges ou orange : cela indique simplement que les chances seraient plus grandes qu’ils aient eu ce type de couleurs.

11- Bien que les colorations vives soient le plus souvent produites par les caroténoïdes, des exceptions notables ont été trouvées chez des oiseaux modernes, comme les psittacofulvines (chez les perroquets), la turacine (chez les touracos et les jacanas) et les sphéniscines (chez les manchots): est-il possible que ces pigments particuliers  existaient déjà chez les précurseurs des oiseaux ?

Sarah N. Davis : bien que ces pigments soient en effet connus chez ces oiseaux, je ne pense pas qu’ils aient été déjà présents chez leurs ancêtres et chez les dinosaures aviens. En effet, ils existent dans des groupes d’oiseaux très éloignés les uns des autres et sont spécifiques.

Touraco à joues blanches (Tauraco leucotis)

La turacine est le pigment à l’origine de la couleur rouge de certaines plumes des touracos, ici celui de Hartlaub (Tauraco hartlaubi).
Photographie : Doug Janson / Wikimedia Commons

Il est peu probable que ces molécules soient apparues indépendamment à la fois chez les dinosaures et chez des groupes particuliers d’oiseaux modernes. Cependant, ces pigments sont encore mal connus, et de nouvelles recherches pourraient nous aider à vérifier ce point. 

12- Finalement, des traces de mélanines ayant été trouvées dans les plumes de précurseurs des oiseaux et de dinosaures, ne serait-il pas logique que des caroténoïdes aient été également présents chez eux ? Comment la science pourrait-elle le prouver à l’avenir ?

Sarah N. Davis : il est tout à fait possible que des caroténoïdes aient été présents aux côtés de la mélanine chez ces animaux. Chez de nombreux oiseaux modernes, les mélanines et les caroténoïdes sont présents dans les mêmes tissus, produisant des colorations complexes. Cependant, les caroténoïdes sont encore moins susceptibles d’être détectés dans les fossiles que les pigments mélaniques, et leur synthèse est très différente : ces derniers sont produits par les animaux eux-mêmes, tandis que les caroténoïdes dépendent de sources alimentaires externes. Ces deux catégories de pigments peuvent également subir des pressions évolutives différentes, en fonction de plusieurs facteurs tels que la sélection du partenaire, l’environnement et la physiologie.
Des travaux futurs pourraient certainement nous aider à évaluer la possibilité de la coexistence des mélanines et de caroténoïdes chez des fossiles. Par exemple, nous pourrions déterminer à quelle fréquence ces deux pigments s’expriment dans les mêmes tissus chez les oiseaux actuels et s’il existe des conditions dans lesquelles cela se produit, nous pourrions évaluer la probabilité d’une coexpression chez des animaux disparus, au moins jusqu’à ce que nous puissions trouver des preuves directes de l’existence passée de colorations liées aux caroténoïdes.

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