Brèves
Un couple de Pygargues à queue blanche a niché avec succès en Espagne dans la nature en 2025, un évènement controversé
Le jeune Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla) né en 2025 dans une aire construite dans le nord de la communauté autonome de Castille-et-León (Espagne).
Source : GREFA
Le Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla) est un grand rapace (jusqu’à 90 cm de long et 2,6 mètres d’envergure) aux longues et larges ailes et à la courte queue cunéiforme. L’adulte se reconnaît à sa queue blanche, à sa tête beige, à son corps brun plus ou moins sombre et à son bec jaune, tandis que le juvénile est plus sombre avec le bec noirâtre. Il niche sur des falaises côtières et sur des arbres en bordure des cours d’eau, des lacs et des étangs. Son régime est essentiellement piscivore, mais il peut aussi chasser les oiseaux aquatiques et manger des charognes.
Selon certaines sources, l’espèce aurait niché pour la dernière fois en Espagne sur l’île de Majorque (Baléares) à la fin du XIXe siècle, mais pour une partie de la communauté ornithologique, il n’existerait pas de preuve fiable d’une présence historique de ce rapace dans la péninsule ibérique Des ossements ont toutefois été trouvés sur l’île voisine d’Ibiza et dans l’archipel des Canaries.
Du fait de cette incertitude, un programme de réintroduction (ou d’introduction, si l’espèce n’a jamais niché dans le pays), appelé « Proyecto Pigargo », lancé par l’association de conservation GREFA, avec le soutien du Ministerio para la Transición Ecológica y el Reto Demográfico et avec la coopération des autorités régionales, lancé en 2021 dans le nord-ouest du pays, fait l’objet de critiques de la part des naturalistes (lire Deux projets de réintroduction du Pygargue à queue blanche en Espagne et en France). Il a toutefois été approuvé par les autorités en 2018 et est soutenu par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature. L’objectif est de constituer à terme une population reproductrice fiable en Espagne.
Situation de la commune de Ribadedeva, dans la communauté autonome des Asturies (Espagne), où 25 Pygargues à queue blanche ont été lâchés depuis 2021. |
Le 2 août 2021, neuf jeunes nés dans la nature en Norvège (où l’espèce est florissante) ont été placés dans une volière dans la localité de Pimiango, dans la commune de Ribadedeva, dans la communauté autonome des Asturies. Après une période d’acclimatation, sept ont été relâchés au cours de l’automne 2021 après avoir été équipés d’un émetteur GPS afin de pouvoir suivre leurs déplacements et obtenir ainsi des informations utiles sur leur adaptation. Le 12 septembre 2022, l’association GREFA a annoncé que 17 jeunes (dix mâles et sept femelles), nés en 2022 en Norvège et équipés d’émetteurs GPS, avaient été relâchés ce même jour dans la localité de Pimiango : ils ont progressivement quitté la volière où ils vivaient depuis plus de deux mois. Ils vont donc rejoindre les cinq oiseaux libérés en 2021 au même endroit. (lire 22 jeunes Pygargues à queue blanche ont été lâchés dans les Asturies en 2021 et en 2022).
Au total, 25 oiseaux ont été libérés depuis le début du projet : 17 sont encore en vie, dont 12 se sont appariés, ce qui montre que leurs taux de survie, d’adaptation et d’accouplement sont élevés.
Dans un communiqué diffusé le 18 septembre 2025, l’association GREFA a annoncé la naissance d’un jeune mâle dans la nature dans le nord de la communauté autonome de Castille-et-León, soit plus d’un siècle après la dernière reproduction supposée de l’espèce en Espagne. Il s’agit donc d’une étape historique du « Proyecto Pigargo ».
Le Ministerio para la Transición Ecológica y el Reto Demográfico et des agents environnementaux du gouvernement régional de Castille-et-León ont apporté leur soutien technique pour le marquage du poussin. Ses parents sont deux individus lâchés dans la nature âgés de quatre ans, « Pimiango » (le mâle) et « Mansolea » (la femelle). L’emplacement de l’aire n’a pas été révélé publiquement afin d’éviter toute perturbation.
Cette naissance a été précédée d’une surveillance rigoureuse et constante (plus de 500 heures) du couple reproducteur par une équipe de l’association GREFA. Mi-2024, elle avait détecté que le couple défendait un territoire, et la construction d’un nid dans un chêne a débuté à partir de février 2025. En mars, la femelle a commencé l’incubation, et l’oisillon est né à la fin du mois de mai. Il a quitté son nid le 18 juillet, puis il a passé dix jours à se muscler et à s’entraîner aux techniques de vol, sous la surveillance et la protection de ses parents, qui ont notamment dissuadé un renard de s’approcher de trop près. Finalement, par une journée venteuse et après de nombreuses tentatives, il a pris son envol et parcouru environ 500 mètres avant d’atterrir dans un arbre.
Depuis, le poussin a entamé ses premiers vols exploratoires en dehors de son territoire d’origine. Il continue d’être nourri par ses parents, qui ne s’éloignent pas trop et lui enseignent des techniques de pêche qui lui permettront de se nourrir de manière autonome à l’avenir.
En tant que prédateur des écosystèmes aquatiques, le Pygargue à queue blanche joue un rôle écologique important : il pourrait contribuer à la maîtrise des populations d’espèces considérées comme invasives en Espagne, comme la Carpe commune (Cyprinus carpio). Grâce à son mode de vie charognard, il contrôle également la propagation des maladies en éliminant efficacement les carcasses animales. Il est enfin très sensible à la qualité de l’eau et constitue donc un bioindicateur de la santé des écosystèmes aquatiques.
Un projet de réintroduction, également contesté, a débuté en 2022 sur les rives françaises du lac Léman (Haute-Savoie), où des oiseaux sont désormais régulièrement vus dans le secteur, par exemple dans la réserve naturelle du delta de la Dranse. D’ici à 2030, 85 jeunes devraient être lâchés.
Rappelons qu’en 2024, l’espèce est revenue spontanément nicher en Belgique plus de 500 ans après son extinction (lire Première naissance en 2024 d’un Pygargue à queue blanche en Belgique depuis près de 500 ans).
Vidéo de présentation du projet de réintroduction « Proyecto Pigargo » du Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla) dans les Asturies (Espagne).
Source : GREFA
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Compléments
Dans la galerie d’Ornithomedia.com
Pygargue à queue blanche (Haliaeetus albicilla)
Source
GREFA (2025). El nacimiento de un pigargo europeo en Castilla y León supone un hito histórico para la biodiversidad española. Date : 18/09. www.grefa.org





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