La Gallinule africaine (Paragallinula angulata) appartenait encore récemment au même genre que la Gallinule poule-d’eau (Gallinula chloropus), mais sa classification taxonomique a récemment été changée afin de résoudre la polyphylie (= absence d’ancêtre commun) de Gallinula (lire Proposition d’une nouvelle classification de la famille des Rallidés). Elle est souvent confondue avec cette espèce familière, mais elle est plus petite, sa ligne blanche latérale est plus étroite, son bec est plus large et presque entièrement jaune (à l’exception d’une zone rouge sur le culmen), et non pas en grande partie rouge, sa plaque frontale a une extrémité pointue et non pas arrondie, et ses pattes sont jaunes et non pas verdâtres. L’immature a un plumage d’un brun-chamois plus chaud que celui de la Gallinule poule-d’eau, et son bec est jaunâtre et non pas brunâtre.

Elle est largement répandue dans les zones humides d’Afrique subsaharienne, à l’exception du sud du continent et de Madagascar.

Gallinule africaine (Paragallinula angulata)

Gallinule africaine (Paragallinula angulata) immature dans une prairie humide près d’Ajaccio (Corse-du-Sud) le 7 mars 2024 : il s’agit a priori de la première donnée pour la France (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Jacques Artieda / Corse-Ornitho

C’est une espèce accidentelle très rare dans le Paléarctique occidental (lire Qu’est-ce que le Paléarctique occidental ?), avec seulement huit données connues jusqu’en 2020 :

  • un immature découvert dans une prairie inondée près d’Olot en Catalogne (Espagne) le 23 janvier 2020.
  • Un immature qui a heurté un immeuble sur l’île de Lanzarote, dans l’archipel des Canaries (Espagne), le 15 janvier 2020. Il a pu être soigné et relâché.
  • Trois oiseaux trouvés en 2020 sur l’archipel du Cap-Vert (lire Observer les oiseaux sur les îles du Cap-Vert), avec respectivement un immature le 24 février sur l’île de Santiago, le 5 mars dans un marais au nord de Santa Maria, sur l’île de Sal, et un adulte sur Boa Vista le 24 juillet.
  • Un oiseau de premier hiver trouvé le 5 février 2000 sur un bateau (lire Ces oiseaux qui voyagent sur des bateaux) au large de Laxe, dans la province de La Corogne (Espagne), mais qui est mort peu après.
  • Une femelle observée le 10 mars 2003 à Algésiras, dans la province de Cadix (Espagne), qui est également morte plus tard.
  • Un mâle collecté à Funchal, sur l’île de Madère (lire Observer les oiseaux sur l’île de Madère), le 26 janvier 1895.

Le 7 mars 2024, alors qu’il observait les oiseaux dans une prairie humide récemment débroussaillée prometteuse pour les migrateurs printaniers proche de l’entrée du siège d’Air Corsica, à l’est d’Ajaccio en Corse-du-Sud (lire Où observer les oiseaux près d’Ajaccio ?), Jacques Artieda a cru avoir aperçu une marouette évoluant dans les jeunes roseaux, mais l’oiseau a finalement nagé en eau libre et il l’a photographié : il s’agissait semble-t-il seulement d’une jeune Gallinule poule-d’eau, comme l’a également pensé au premier abord Bernard Recorbet, qui a pu l’observer avec sa longue-vue.

Situation d'Ajaccio (Corse-du-Sud)

Situation d’Ajaccio (Corse-du-Sud).
Carte : Ornithomedia.com

Jacques a publié ses clichés sur son blog Corse-Ornitho, et peu après, un visiteur, Thomas Galewski , a remarqué que cette gallinule n’était pas « ordinaire » : c’était en effet une jeune Gallinule africaine, au gros bec en grande partie jaune avec le culmen sombre bien visible.  Bernard Recorbet a pu la revoir le 9 mars, et Jacques a transmis un dossier au Comité d’Homologation National. 

C’est a priori la première observation de cette espèce africaine pour la France métropolitaine, et l’une des rares données pour le Paléarctique occidental. Elle confirme le fort potentiel des zones humides proches d’Ajaccio, et plus largement, l’intérêt ornithologique méconnu et sous-estimé de la Corse, notamment pour la découverte d’oiseaux accidentels rares venus du Sud. Enfin, elle démontre qu’il faut être attentif quand on observe les oiseaux communs, car une surprise est toujours possible.

Le statut de la Gallinule africaine semble en train de changer en Europe du Sud, avec une augmentation apparente des données depuis 2019, peut-être en relation avec le changement climatique qui favorise les arrivées d’espèces africaines sur notre continent (lire Le Bruant du Sahara a niché pour la première fois en Europe en 2023).

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