Brèves
La population de Grands Tétras cantabriques a augmenté entre 2019 et 2024 et semble donc avoir arrêté son déclin
Grand Tétras cantabrique (Tetrao urogallus cantabricus) mâle.
Source : Ministerio para la Transición Ecológica y el Reto Demográfico
Le Grand Tétras (Tetrao urogallus) est un gallinacé vivant dans les forêts de montagne et dans la taïga (lire Gros plan sur le Grand Tétras). Son aire de répartition s’étend du nord-ouest de l’Espagne et de l’Écosse (Grande-Bretagne) à la Sibérie orientale et à la Chine. Huit sous-espèces sont actuellement reconnues, dont deux nichent en Espagne : T. u. aquitanicus dans les Pyrénées et T. u. cantabricus dans la cordillère Cantabrique (ou monts Cantabriques), un massif montagneux qui longe le golfe de Gascogne et qui s’étend de la communauté autonome du Pays basque à celle de Galice. Selon plusieurs auteurs cette dernière sous-espèce ne serait toutefois plus valide.
Aires de répartition des sous-espèces T. u. cantabricus (A) et T. u. aquitanicus (B) du Grand Tétras (Tetrao urogallus). |
Dans un communiqué publié en juin 2025 sur le site web du Ministère espagnol de la Transition écologique et du Défi démographique ou Ministerio para la Transición Ecológica y el Reto Demográfico (MITECO), on apprend que la population de Grands Tétras cantabriques aurait atteint 209 individus en 2024 selon les résultats des travaux d’un groupe de travail dédié à la conservation de cette sous-espèce classée en danger critique depuis 2018, soit une augmentation de 8 % par rapport aux 191 estimés lors du précédent échantillonnage complet de 2019. Parmi ces 209 individus, 117 (56 %) sont des mâles et 92 (44 %) des femelles. Lors du recensement précédent, le sex-ratio était plus prononcé en faveur des mâles (31,5 % de femelles pour 68,5 % de mâles). Près de 67 % de la population vivent dans la communauté autonome de Castille-et-León (dans les divisions territoriales ou comarques d’Alto Sil, de Laciana et d’Omaña, avec des individus dispersés dans celles d’Ancares et d’El Bierzo), les 33 % restants étant répartis dans la Principauté des Asturies (dans les comarques de Degaña, Cangas de Narcea et Ibias).
Le groupe de travail qui a effectué cette estimation est composé de représentants des communautés autonomes où la sous-espèce T. u. cantabricus est actuellement ou était récemment présente (Castille-et-León, Asturies et Cantabrie) et est coordonné par la Dirección General de Biodiversidad, Bosques y
Desertificación, qui dépend du MITECO. Il bénéficie par ailleurs du soutien de conseillers externes spécialisés dans la conservation de l’espèce, d’experts scientifiques, d’associations de conservation et de consultants experts.
Les comptages sur le terrain ont été réalisés entre avril et juin 2024 par le personnel des communautés autonomes et du MITECO : 320 parcelles (177 dans les Asturies et 143 en Castille-et-León) ont été parcourues, chacune couvrant une superficie d’environ 17,5 hectares. Des excréments ont été localisés le long de 1 185 km de transects (= lignes virtuelles) définies dans des zones critiques pour la sous-espèce. Au total, 959 échantillons ont été collectés, puis stockés et identifiés pour effectuer une analyse génétique : 719 en Castille-et-León et 240 dans les Asturies. Sur ce total, 393 ont été génotypés et attribués à 106 Grands Tétras différents. L’estimation, basée sur des modèles de capture-recapture, a permis de dénombrer 209 individus, avec un intervalle de confiance à 95 % de 171 à 251 oiseaux, dont 117 (56 %) mâles et 92 (44 %) femelles.
Il s’agit de la deuxième estimation complète depuis 2018, et il est donc encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur les tendances à long terme, mais ces résultats suggèrent un arrêt de son déclin, voire une légère augmentation par rapport à la situation de 2019. La proportion de femelles est en hausse, ce qui est encourageant car ce sont elles qui déterminent en grande partie le succès reproductif de l’espèce.
Le succès de la reproduction est évalué chaque année lors de recensements estivaux, qui, pour la période de 2018 à 2024, ont donné une moyenne de 1,14 poussin/femelle pour un échantillon total de 129 femelles suivies. Les facteurs de mortalité sont également mieux connus : sur les 17 spécimens retrouvés morts depuis 2018, 13 sont dus à la prédation et un est mort par collision, les causes de trois autres étant inconnues.
Les taux de survie individuels des Grands Tétras cantabriques, leur utilisation de l’espace et des ressources alimentaires et les comportements des femelles à différentes périodes de l’année sont mieux connus, grâce à la posé d’émetteurs sur 50 oiseaux au cours des dix dernières années. Le taux de succès de la reproduction a augmenté grâce à la réduction de la pression de prédation exercée par les mammifères généralistes communs dans la région, en particulier la Martre des pins (Martes martes) et le Renard roux (Vulpes vulpes). Il est aussi prévu de déplacer des rapaces nicheurs, y compris l’Aigle royal (Aquila chrysaetos). Des évaluations comparatives ont montré une augmentation moyenne de 0,5 poussin/femelle entre les zones avec et sans réduction du nombre de prédateurs. Cette mesure permettrait ainsi un accroissement d’environ 50 poussins par an pour 100 femelles s’étant accouplées, et elle pourrait être appliquée jusqu’à ce que la situation critique s’améliore de façon durable.
Centre d’interprétation sur le Grand Tétras cantabrique à Caboalles de Arriba, dans la comarque d’Alto Sil (Castille-et-León). |
Des travaux d’amélioration de l’habitat, qui s’appuient sur les connaissances scientifiques des besoins écologiques de la sous-espèce, sont également menés, leurs objectifs étant d’augmenter la disponibilité des ressources trophiques et d’améliorer sa capacité à se protéger, à se reposer et à se déplacer. Ils sont en cours d’évaluation scientifique afin de vérifier leur effets écologiques.
Les résultats de 2024 sont encourageants et incitent à poursuivre les efforts de conservation engagés depuis 2018. Une nouvelle estimation est prévue en 2027, afin de garantir des mises à jour plus fréquentes.
L’élevage en captivité constitue un autre axe d’action visant à améliorer l’état de conservation de la sous-espèce T. u. cantabricus, en renforçant les populations existantes et en la réintroduisant dans les zones où elle était présente il y a encore quelques décennies et qui présentent actuellement les caractéristiques favorables pour l’accueillir à nouveau. Bien qu’aucun individu n’ait encore été relâché dans la nature depuis 2018, les deux centres d’élevage en captivité de Valsemana et de Sobrescobio, gérés respectivement par les gouvernements régionaux de Castille-et-León et des Asturies, finalisent leurs techniques. L’objectif est de disposer de 40 femelles et de 20 mâles reproducteurs dans le centre de Valsemana et de relâcher à terme de 80 à 100 individus par an. Les premiers lâchers sont prévus en 2026, conformément au calendrier et aux objectifs chiffrés fixés par le groupe de travail.
Le communiqué précise qu’il existe par ailleurs un protocole de coopération technique avec le Ministère français de la Transition écologique, de la Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche pour le développement d’un programme de conservation ex-situ de la sous-espèce T. u. aquitanicus, incluant notamment le transfert d’oiseaux. La France fournirait des œufs fécondés prélevés dans le milieu naturel dans les Pyrénées pour alimenter le centre d’élevage espagnol, l’objectif étant d’apporter de la diversité génétique aux oiseaux ibériques et d’obtenir une génération captive donnera naissance à des jeunes qui seront lâchés dans le milieu naturel.
Grand Tétras cantabrique (Tetrao urogallus cantabricus) mâle filmé par un piège photographique dans la cordillère Cantabrique (Espagne) le 9 mai 2023.
Source : CELTA
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Compléments
Ouvrages recommandés
- Le Grand tétras, caroncules écarlates et bec d’ivoire (2017) de Patrick Zabé
- Le Grand Tétras (2018) de Bernard Leclercq et Emmanuel Menoni
- Grand tétras (2011) de Jacques Rime
- Le Grand coq de bruyère, ou grand tétras (1988) de Bernard Leclercq
Source
Ministerio para la Transición Ecológica y el Reto Demográfico (2025). La población de urogallo cantábrico asciende a 209 ejemplares en 2024 . www.miteco.gob.es




2 commentaires
2 commentaire(s) sur ce sujet
Participer à la discussion !marie
paris
Posté le 05 octobre 2025
« Le taux de succès de la reproduction a augmenté grâce à la réduction de la pression de prédation exercée par les mammifères généralistes communs dans la région, en particulier la Martre des pins (Martes martes) et le Renard roux (Vulpes vulpes) Il est aussi prévu de déplacer des rapaces nicheurs, y compris l’Aigle royal (Aquila chrysaetos). »
C’est les chasseurs qui doivent être contents.
David
sevran
Posté le 05 octobre 2025
Bonjour, en effet, ces actions sont assez discutables, mais elles pourraient avoir un effet, en tout cas temporaire. Cordialement Ornithomedia