Les Mésanges nonnette et boréale, deux espèces peu communes visitant parfois les mangeoires

Mésange boréale (Poecile montanus rhenanus)

Mésange boréale (Poecile montanus rhenanus) à Commanster (Belgique) : notez les joues blanches et la grande calotte noire mate. 
Photographie : James K. Lindsey / Wikimedia Commons

Les Mésanges nonnette (Poecile palustris) et boréale (P. montanus) sont deux espèces moins connues que les Mésanges charbonnière (Parus major) et bleue (Cyanistes caeruleus) car elles sont beaucoup moins communes, plus discrètes et visitent plus rarement les mangeoires, voire pratiquement jamais pour la seconde. Elles sont en outre très difficiles à différencier l’une de l’autre, même s’il existe plusieurs critères pour les identifier (lire Distinguer les Mésanges nonnette et boréale).
Par rapport à la Mésange nonnette, la Mésange boréale a une calotte d’un noir plus mat et qui descend plus bas sur la nuque, une bavette noire plus grande aux contours moins nets, des joues blanches plus étendues devenant progressivement chamois clair au niveau de la zone auriculaire, un cou plus épais (ce qui l’aide sûrement à creuser son nid dans le bois mort) et une zone pâle sur les ailes au niveau des rémiges secondaires et tertiaires. En outre, elle n’a pas de petite tache blanche sur la mandibule supérieure (un critère difficile à voir sur le terrain) et ses cris et son chant sont différents. Pour limiter les risques de confusion, facile à cause des variations entre individus, liées à la saison, à l’âge et aux conditions d’observation, il faut essayer de combiner le maximum de critères.
Deux sous-espèces de la Mésange boréale sont visibles en France : la Mésange des saules (P. m. rhenanus), qui vit dans les boisements humides du nord-est du pays, et la Mésange alpestre (P. m. alpestris), qui recherche les forêts alpines de résineux. Elles sont difficiles à distinguer l’une de l’autre, la principale différence étant leur chant, composé de notes pures et tristes, de fréquence constante (« u u u u u » ou « duh duh duh ») pour la première et de notes modulées mélancoliques, allant légèrement decrescendo (« tsiu tsiu tsiu ») pour la seconde.

Les Mésanges bleue et charbonnière, deux espèces dominantes 

Mésange bleue (Cyanistes caeruleus)

La Mésange bleue (Cyanistes caeruleus) domine les autres mésanges sur les mangeoires, sauf la Mésange charbonnière (Parus major).
Photographie : Eric Canadas

Les Mésanges bleue et charbonnière sont deux passereaux très communs en Europe de l’Ouest, dont l’abondance a fortement augmenté depuis quelques décennies : ainsi, en Grande-Bretagne, leurs populations auraient progressé respectivement de 24 et de 89 %. Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : de bonnes capacités d’adaptation (lire Le « côté sombre » de la Mésange charbonnière), une bonne résistance physique, une forte natalité (les Mésanges bleues nichent fréquemment deux fois par an, contre une seule fois pour la Mésange nonnette), une certaine agressivité (lire Les mésanges peuvent se battre à mort pour occuper une cavité en hiver) et un statut social dominant, par exemple au sein des troupes mixtes en hiver, qu’elles mènent volontiers (lire Les rondes d’oiseaux), ce qui leur permet d’accéder en premier aux ressources alimentaires et d’occuper en priorité les cavités favorables pour nicher.

Les Mésanges nonnette et boréale, deux espèces plus discrètes

Les Mésanges nonnette et boréale sont beaucoup moins abondantes que les Mésanges bleue et charbonnière. Elles sont en effet plus exigeantes dans le choix de leur habitat de nidification et elles occupent, même en hiver, un vaste territoire qui doit leur fournir les ressources nécessaires pour se nourrir et pour nicher : leur densité est donc moindre.
Elles stockent en outre des aliments en automne et en hiver, ce qui leur donne normalement un avantage lors des périodes difficiles, ce que ne font pas les Mésanges bleue et charbonnière, qui doivent chercher de la nourriture tous les jours. Les Mésanges nonnette et boréale ont ainsi normalement un avantage sur leurs concurrentes lors des hivers rudes, mais le nourrissage dans les jardins modifie les « règles du jeu » en annulant les effets climatiques et en favorisant les espèces dominantes et adaptables, y compris dans des habitats où elles étaient autrefois absentes.
Même si les Mésanges nonnette et boréale sont souvent les premières à repérer de nouvelles sources de nourriture grâce à leur bonne connaissance de leur territoire, elles sont vite dépassées par les Mésanges bleue et charbonnière, plus nombreuses et plus agressives. Quand la nourriture devient rare dans les bois, ces dernières peuvent visiter les mangeoires dans les jardins, ne laissant que de maigres ressources aux Mésanges nonnette et boréale qui restent confinées dans leur domaine : elles ne profitent donc pas des apports de nourriture.

Mésange boréale (Poecile montanus) de la sous-espèce britannique kleinschmidti

Mésange boréale (Poecile montanus) de la sous-espèce britannique kleinschmidti à Standish, dans le Lancashire (Grande-Bretagne).
Photographie : Francis C. Franklin / Wikimedia Commons

La Mésange boréale creuse elle-même sa cavité dans le bois mort, ce qui lui donne en théorie un avantage sur les espèces qui ont besoin de sites de nidification déjà disponibles. Elle peut passer une semaine à creuser son nid, mais il peut être ensuite être « réquisitionné » par les Mésanges bleue et charbonnière dominantes : ce serait le cas de près d’un nid sur cinq dans le nord de l’Angleterre. Dans une population écossaise qui a depuis disparu, ce pourcentage atteignait même 67 %, certaines Mésanges boréales ayant perdu jusqu’à quatre nids successivement lors d’une seule saison, les empêchant probablement de se reproduire.
Une étude menée durant vingt ans dans le Cambridgeshire (Grande-Bretagne) sur une population en déclin de Mésanges nonnettes a montré une mortalité accrue des juvéniles en été à cause de la domination des Mésanges bleue et charbonnière, qui exploiteraient en premier les ressources alimentaires disponibles.
Les populations de Mésanges nonnette et boréale sont ainsi en déclin en Grande-Bretagne, et la sous-espèce endémique kleinschmidti de la Mésange boréale est même désormais en voie de disparition. En France, la situation de la Mésange nonnette est plus favorable, avec une hausse de 9 % de ses effectifs sur la période 1989-2019, mais la chute est forte pour la Mésange boréale (- 49 % sur la même période).

Les effets de la prédation par le Pic épeiche

La prédation par le Pic épeiche (Dendrocopos major) constitue une autre menace pour la nidification des Mésanges nonnette et boréale, car il est capable de manger leurs petits (lire Pillage des nichoirs par les pics : agrafez du grillage) : en effet, comme les Mésanges bleue et charbonnière, il a bénéficié du nourrissage dans les jardins et sa population a augmenté de 387 % depuis les années 1960 en Grande-Bretagne ! Le taux d’échec des Mésanges boréales est le plus élevé au sein de la famille des Paridés, compris entre 30 et 67 % dans le nord de l’Angleterre. Les Mésanges nonnettes s’en sortent un peu mieux, avec un taux d’échec moyen inférieur à 20 % : en effet, leurs cavités creusées dans des arbres vivants sont plus sûres que celles créées dans le bois pourrissant.

Comment limiter les effets du nourrissage sur la compétition entre mésanges ?

Mésange nonnette (Poecile palustris)

Pour aider les Mésanges nonnettes (Poecile palustris) en leur permettant  d’accéder à la nourriture malgré la présence des Mésanges bleue (Cyanistes caeruleus) et charbonnière (Parus major), vous pouvez multiplier les lieux de distribution, par exemple sur des souches. 
Photographie : Jean-Pascal Weber / Les oiseaux dans leur environnement

Bien que le nourrissage des oiseaux semble donc favoriser les Mésanges bleue et charbonnière au détriment des Mésanges nonnette et boréale, nous ne conseillons pas de l’arrêter totalement, mais de prendre en compte ce paramètre lorsque ces deux dernières espèces visitent parfois votre jardin ou nichent à proximité : dans ce cas, il est préférable de le limiter aux périodes les plus froides (couverture neigeuse persistante et gel prolongé). 
La Mésange boréale visite très rarement les mangeoires, mais pour que la Mésange nonnette ait une chance d’accéder à vos aliments, vous pouvez multiplier les points de distribution (sur des souches, dans les fourches des arbres, etc.) afin d’éviter que ses compétitrices ne monopolisent les mangeoires : elle pourra ainsi en stocker une partie pour la suite de l’hiver.  
La Mésange nonnette apprécie les mêmes semences que les Mésanges bleue et charbonnière, notamment les graines de tournesol, les noisettes et les arachides (lire Quelles graines à donner pour quelles espèces d’oiseaux ?), mais également les insectes (vous pouvez distribuer des vers de farine déshydratés par exemple) et les baies de différents buissons (viornes, cotonéasters, sorbiers, etc.) et de plantes grimpantes, comme le chèvrefeuille : vous pouvez donc en planter dans votre jardin (lire Conseils pour aménager son jardin pour les oiseaux). 
Si vous voulez favoriser leur nidification, installez des nichoirs dont le trou d’entrée ne dépassera pas 25 mm de diamètre, ce qui ne permettra pas aux Mésanges charbonnières de s’installer (par contre, cela ne découragera pas les Mésanges bleues).

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