La Tourterelle orientale (Streptopelia orientalis) ressemble étroitement à la Tourterelle des bois (S. turtur) mais il en diffère par sa taille légèrement plus grande (+ 15 % environ), ses couvertures et ses scapulaires ocre-brun et non pas orange-roux et dont le centre sombre est plus large et plus diffus, la présence de deux étroites barres alaires pâles le long des grandes et moyennes couvertures alaires, une zone gris-bleuté des ailes plus sombre, une poitrine gris-rose plus sombre, un croupion d’un gris-bleu plus sombre et une zone de peau nue autour des yeux plus étroite. Les juvéniles et les oiseaux de premier hiver sont plus ternes et sont encore plus difficiles à différencier, d’autant plus que les variations individuelles sont nombreuses. Son vol est plus lent et plus direct que celui de la Tourterelle des bois, et son chant est également différent : c’est un roucoulement qui rappelle un peu celui du Pigeon ramier (Columba palumbus), étouffé et irrégulier, que l’on pourrait retranscrire par « kruuu, ku-kruuu, Ooh ».  

Aire de répartition de la Tourterelle orientale

Aire de répartition de la Tourterelle orientale(Streptopelia orientalis) toutes sous-espèces confondues. En rouge, les zones où l’espèce est migratrice, et en vert, celles où elle est sédentaire.
Carte : Ornithomedia.com

La Tourterelle orientale niche dans les zones boisées claires du sud-ouest de l’Oural à l’île de  Sakhaline (Russie), au sud de l’Inde et à la péninsule indochinoise, jusqu’à 4 000 mètres d’altitude. Les populations les plus septentrionales sont migratrices et hivernent au sud de l’Himalaya, parfois jusqu’au Sri Lanka et au centre de la Thaïlande, alors qu’elles sont sédentaires dans les régions subtropicales et tropicales. Dans cette vaste aire de répartition, six sous-espèces sont actuellement reconnues, S. o. meena étant celle ayant l’aire de reproduction la plus occidentale (du sud-ouest de la Sibérie à l’Iran, Afghanistan, Cachemire et Népal).
 
En dehors de la saison de nidification, des Tourterelles orientales originaires de Sibérie peuvent atteindre l’Europe, où c’est une espèce accidentelle très rare, avec par exemple seulement cinq données homologuées en France entre 1981 et 2004, principalement en hiver (lire Observation et identification d’une Tourterelle orientale dans le Lot-et-Garonne en février 2012). Toutefois, étant donné les difficultés d’identification, sa fréquence d’apparition sur notre continent est peut-être sous-estimée : en 1994, le British Birds Rarities Committee avait ainsi rejeté trois des huit données britanniques de l’époque. Toutefois, l’observation en hiver d’une Tourterelle des bois doit alerter les observateurs, cette espèce passant normalement la mauvaise saison en Afrique, malgré l’initiative récente de créer une population sédentaire en Grande-Bretagne (lire Une intéressante tentative de création d’une population sédentaire de Tourterelles des bois en Grande-Bretagne).

Dans le journal ornithologique Crex, on apprend que depuis 2015, des Tourterelles orientales sont observées chaque année dans le secteur des réservoirs de Nové Mlýny en Tchéquie (107 données jusqu’en octobre 2022), dont un groupe de trente oiseaux. La plupart des observations ont été faites entre octobre et mars, lorsque la Tourterelle des bois n’est pas présente en Europe centrale, mais ces oiseaux sont probablement tous d’origine captive, certains étant munis de bagues posées par les éleveurs. En 2022, une reproduction dans la nature a été confirmée pour la première fois : un nid a été trouvé dans un Prunier cerise (Prunus cerasifera) sur la rive sud du réservoir de Nové Mlýny, entre les villages de Dolní Věstonice et de Pavlov, dans le district de Břeclav. Les 3 et 5 avril 2022, un adulte a été trouvé dans son nid en train d’incuber ses œufs ou de couver ses poussins. Le 14 avril, un adulte et deux gros poussins étaient présents. Le 21 avril, le nid était vide, et lors d’une vérification détaillée le 26 avril, des plumes de juvéniles ont été trouvées, ce qui suggère qu’une  prédation a eu lieu (voir des photos dans l’article du journal Crex). 

Situation des réservoirs de Nové Mlýn (Tchéquie)

Situation des réservoirs de Nové Mlýn (Tchéquie).
Carte : Ornithomedia.com

Cette donnée a été acceptée par le Comité d’Homologation Tchèque dans la catégorie E (espèces évadées de captivité). Néanmoins, il est possible qu’à l’avenir, la Tourterelle orientale puisse remplir en Tchéquie les critères de la catégorie C, qui regroupe les espèces relâchées ou échappées se reproduisant dans la nature de façon autonome. Le possible début d’établissement d’une population férale (=composée d’oiseaux échappés de captivité) en Europe centrale va ainsi encore compliquer l’homologation des Tourterelles orientales vues sur notre continent, leur origine sauvage devenant encore plus compliquée à prouver. 

Par ailleurs, on constate une lente progression vers l’ouest de l’aire de reproduction de la Tourterelle orientale en provenance de ses sites de nidification sibériens : par exemple, au cours des dernières années, elle a commencé à nicher dans les monts Ilmen, au sud des monts Oural (Russie), où sa population atteindrait plus de 20 000 couples, et elle se reproduit désormais dans les limites du paléarctique occidental (lire Qu’est-ce que le Paléarctique occidental ?).

En Russie et au Kazakhstan, la Tourterelle orientale est une espèce strictement migratrice, qui retourne même sur ses sites de nidification après la Tourterelle des bois, avec laquelle elle coexiste. Dans le secteur des réservoirs de Novomlýn (Tchéquie), elle est sédentaire, et elle est souvent observée près des installations humaines, notamment près d’une usine de transformation des poissons.

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