Le Vautour de Rüppell (Gyps rueppellii) est un peu plus petit que le Vautour fauve (G. fulvus). L’adulte a un plumage foncé densément parsemé de taches blanc-beige dessus et dessous. Le long cou est gris avec la nuque rosâtre ou rougeâtre, la collerette est blanche et le jabot est marron. L’iris est jaune ou ambre et le bec est blanchâtre. Le dessin du dessous des ailes est caractéristique, avec au moins une nette bande pâle contrastant avec le reste des couvertures sombres (lire Identifier le Vautour de Rüppell et le rechercher dans la péninsule ibérique).

Le plumage du juvénile est moins marquant, mais il a aussi un plumage écailleux : il a des plumes chamois sur un fond marron sombre, tandis que les couvertures du dessus des ailes présentent des marques pâles en forme d’ancres. La collerette est chamois et le bec est gris sombre. Après la première année, l’immature commence à acquérir le plumage écailleux typique de l’adulte, en commençant par le dessous de la queue, les flancs et les axillaires. Le bec reste grisâtre, et la tête et le cou sont gris-rose rougeâtre avec du duvet brun.

Il niche dans les milieux arides (savane et semi-désert) avec des zones rocheuses (falaises, blocs, ravins, etc.) de la Mauritanie à la Somalie et au nord de la Tanzanie. Deux sous-espèces sont reconnues : G. r. erlangeri en Éthiopie et en Somalie (plus pâle et avec des liserés clairs des plumes plus larges), et G. r. rueppelli dans le reste de son aire de répartition.

Aires de répartition des Vautours fauve et de Rüppell

Aires de répartition des Vautours fauve (Gyps fulvus) (vert) et de Rüppell (G. rueppellii) (en violet). Flèche orange : mouvements de Vautours fauves entre le Sud-ouest de l’Europe et l’Afrique de l’Ouest en automne et au printemps via le détroit de Gibraltar. La situation de la province de Málaga (Espagne), où un couple mixte a niché avec succès en 2022-2023, est indiquée.
Carte : Ornithomedia.com 

L’erratisme des immatures et des subadultes les pousse parfois à traverser le détroit de Gibraltar en suivant les Vautours fauves nichant dans le sud de la péninsule ibérique qui reviennent de leurs zones d’hivernage situées en Afrique de l’Ouest (lire Le Vautour de Rüppell autour du détroit de Gibraltar). La première donnée européenne remonte à 1992 en Espagne, et depuis, plus d’une centaine d’observations ont été faites dans ce pays, tous les oiseaux appartenant a priori à la sous-espèce ouest-africaine G. r. rueppellii plus sombre que la sous-espèce orientale. Certains d’entre eux ont même atteint la France (lire Un visiteur africain parmi les vautours des gorges de la Jonte depuis janvier 2023).

Quelques cas de reproduction de couples mixtes avec des Vautours fauves ont déjà été signalés : en 1999, un adulte a été observé au Portugal dans une probable aire, mais le succès de la reproduction n’a pas été confirmé. En 2020, une femelle a été vue s’accouplant avec un Vautour fauve dans la province de Cadix, et une autre apportant des matériaux de nidification a été observée dans la province de Málaga. Dans cette dernière, des tentatives de reproduction de couples mixtes ont été régulièrement signalées en 2021 et en 2022 dans une colonie, mais une surveillance étroite a confirmé qu’aucune ponte n’a eu lieu.

Dans un article à paraître en 2024 dans la revue Ardeola rédigé par Antonio-Román Muñoz, Juan Ramírez et Raimundo Rea, on apprend qu’un mâle suivi dans le cadre d’un projet européen LifeWatch, a été observé à plusieurs reprises en décembre 2022 s’accouplant avec une femelle de Vautour fauve. Cette dernière a commencé à couver un œuf à la fin du mois de décembre 2022. L’éclosion a eu lieu au printemps 2023, constituant ainsi le premier cas confirmé de reproduction dans la nature d’un couple composé des deux espèces. En septembre 2023, le jeune a quitté son aire et restait sous la surveillance étroite de ses parents. 
 
Alors que le Vautour de Rüppell commence à coloniser le Paléarctique occidental (lire Qu’est-ce que le Paléarctique occidental ?), il subit un déclin rapide dans sa région afrotropicale d’origine, en raison principalement des empoisonnements, de la chasse à des fins commerciales, des électrocutions et des collision avec des lignes électriques. Il est désormais inscrit sur la Liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.

Vautours fauve et de Rüppell

Vautours fauve (Gyps fulvus) (à gauche) et de Rüppell (G. rueppellii) en hiver au Sénégal (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Antonio-Román Muñoz

La péninsule ibérique, qui accueille les plus grandes populations européennes de rapaces nécrophages, semble favorable à l’installation de ce rapace d’origine tropicale et pourrait donc jouer un rôle futur dans sa conservation. Des couples purs (= composés de deux Vautours de Rüppell) n’y ont pas encore été observés, même si jusqu’à trois oiseaux, dont au moins deux de sexes différents, ont déjà été vus se nourrissant ensemble dans un charnier. 

Les cas de couples mixtes vont probablement se poursuivre et même augmenter en Europe dans les années à venir, ces deux espèces ayant tendance à s’associer. En cas de succès, les hybrides issus de ces croisements, pourraient être stériles ou bien se reproduire avec des Vautours fauves, qui sont largement majoritaires numériquement, produisant des hybrides de seconde génération. Ce processus pourrait entraîner à terme l’extinction génétique du Vautour de Rüppell en Europe. Ainsi, alors que l’installation de ce rapace en Europe constitue un espoir pour ce dernier, le phénomène d’hybridation pourrait constituer une menace, qui s’ajoute à la mortalité associée aux mouvements entre l’Afrique et l’Europe, qui passent par le Sahara. 

Parallèlement à ce que l’on observe dans la péninsule ibérique avec le Vautour fauve, on signale en Afrique du Sud des cas d’hybridation du Vautour de Rüppell avec un autre rapace, le Vautour chassefiente (Gyps coprotheres). En mai 1996, un Vautour de Rüppell mâle a ainsi été observé s’accouplant (sans suite) avec une femelle de la seconde espèce. En juillet 1999, un oiseau a été aperçu couvant un œuf dans un nid à côté d’un Vautour chassefiente, et ce couple aurait donné naissance au total à deux jeunes en deux ans qui n’ont toutefois pas survécu. 

Les auteurs de l’article recommandent de mettre en place une coopération internationale entre les pays de la péninsule ibérique, du Maghreb et d’Afrique australe pour mener des actions de conservation concertées du Vautour de Rüppell. 

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