Brèves
Le Pic tridactyle poursuit son expansion dans les Alpes italiennes
Pic tridactyle (Picoides tridactylus) mâle dans le Val Pusteria, dans la région du Trentin-Haut-Adige (Italie), le 23 août 2023.
Photographie : Carlo Caimi / Wikimedia Commons
Le Pic tridactyle (Picoides tridactylus) vit dans les vieilles forêts de conifères (en plaine et en montagne) d’Eurasie, de l’Europe centrale à la Corée. Il est noir et blanc et son aspect général est assez sombre car ses ailes sont foncées, de grandes barres noires parcourent sa tête et ses flancs sont densément barrés. Son dos est blanc chez la sous-espèce nominale nichant de l’Europe du Nord à l’Extrême-Orient et barré de noir chez la sous-espèce alpinus qui se reproduit dans les montagnes d’Europe centrale et des Balkans. La femelle pond généralement 3 à 4 œufs durant la seconde moitié de mai. Couverts par les deux parents pendant 11 à 14 jours, les oisillons quittent le nid après 22 à 26 jours, mais restent auprès de leurs parents pendant environ un mois.
Son aire de répartition européenne est liée à la présence de l’Épicéa commun (Picea abies) et du Sapin blanc (Abies alba). Il a besoin de la présence d’arbres morts ou affaiblis, que ce soit suite au passage du feu (lire Martijn Versluijs nous décrit les effets des feux de forêt sur la population et sur le comportement de nourrissage du Pic tridactyle), par manque ou par excès d’eau (lire Le Castor d’Europe pourrait favoriser l’installation du Pic tridactyle) : en effet, il se nourrit des insectes xylophages.
Bien que peu farouche, c’est une espèce incroyablement discrète, ce qui rend sa recherche difficile. En France, c’est un nicheur très rare et méconnu dans les Alpes (lire) et le Jura (lire ), et la population nationale compterait moins de 50 couples. En Italie, l’espèce s’est installée dans le nord-est du pays à partir de l’Autriche, et il est en expansion depuis le début du XXIe siècle (lire La population du Pic tridactyle dans le nord-est de l’Italie aurait augmenté de 60 % en 15 ans), et il y aurait actuellement entre 150 et 300 couples répartis entre 1 000 et 1 800 mètres d’altitude dans les régions du Trentin-Haut-Adige, du Frioul-Vénétie Julienne (entre 40 et 50 couples), de la Vénétie, du Val d’Aoste et de la Lombardie.
Aire de répartition italienne approximative du Pic tridactyle (Picoides tridactylus) en Italie et axes de progression de l’espèce (flèches noires). La situation de Ponte di Legno, où la nidification a été prouvée en 2024, est indiquée. |
La progression de l’espèce dans les Alpes italiennes semble se poursuivre. Dans une vidéo publiée en décembre 2025 (voir en bas de cet article), Pierandrea Brichetti nous indique en effet qu’après quelques observations durant l’automne 2022 et l’hiver 2023, la nidification d’un couple a été confirmée pour la première fois dans la province de Brescia (plus précisément dans la commune de Ponte di Legno) en 2024, puis reconfirmée au même endroit en 2025. Le site de reproduction se situait dans une forêt mixte de mélèzes et d’épicéas, à environ 1 730 mètres d’altitude, dans la haute vallée de Camonica.
Les pessières sont les formations les plus utilisées par le Pic tridactyle, et il profite aujourd’hui des vastes plantations réalisées il y a plusieurs décennies. Leur vieillissement, lié à l’abandon de la sylviculture, à l’exode rural, à une plus grande disponibilité de bois sec et en décomposition due à des événements climatiques extrêmes, comme la tempête « Vaia » qui a frappé le nord-est du pays en 2018, et à l’action du Bostryche typographe (Ips typographus), favorise cette espèce. D’autre part, la propriété forestière très morcelée du sud des Alpes, qui favorise le maintien de groupes d’arbres morts, ainsi que le territoire accidenté, qui gêne ou empêche l’exploitation forestière, sont d’autres facteurs favorables.
Cependant, le changement climatique, entraînant un déclin de l’épicéa, pourrait à l’avenir contraindre le Pic tridactyle à chercher refuge à des altitudes toujours plus élevées, avec le risque d’une réduction de son aire de répartition et de sa population.
Par ailleurs, la densité du nombre de couples de Pics tridactyles (0,16 à 0,40 territoire pour 100 hectares) dans les Alpes italiennes est faible : en effet, cette espèce a besoin de vastes territoires et les zones favorables sont séparées par de vastes zones non utilisées. Elle reste néanmoins comparable à celle observée dans d’autres pays : 0,02 à 5 territoires pour 100 hectares dans le sud de la Finlande, 0,09 à 0,12 en Slovaquie et 0,9 à 1 dans le sud-est de l’Allemagne (lire Deux bons secteurs bavarois pour observer les Pics à dos blanc et tridactyle).
Cette progression du Pic tridactyle dans le nord-est de l’Italie ne signifie pas que des mesures de conservation ne doivent pas être prises : en effet, il est nécessaire de protéger les vieux arbres, d’éviter les interventions forestières durant la période de nidification et de limiter la construction d’infrastructures routières et touristiques au strict minimum.
Ailleurs en Europe, d’autres picidés profitent aussi du vieillissement des étendues boisées, comme le Pic mar (Leiopicus medius) en France et en Belgique (lire Le retour des champignons, des coléoptères et du Pic mar).
Précisons que le Frioul-Vénétie julienne est une région très intéressante pour l’observation des oiseaux : on peut y observer tout le cortège des oiseaux alpins, et du fait de sa situation géographique, on peut aussi y observer des espèces orientales comme la Chouette de l’Oural (Strix uralensis) (lire À propos de la Chouette de l’Oural en Italie).
Vidéo sur la nidification confirmée du Pic tridactyle (Picoides tridactylus) dans la province de Brescia (Italie) en 2024.
Source : Pierandrea Brichetti
Réagir à notre article
Compléments
Dans la galerie d’Ornithomedia.com
Pic tridactyle (Picoides tridactylus)
Ouvrage recommandé
Le guide Ornitho de L. Svensson et al
Source
Pierandrea Brichetti (2025). Picchio tridattilo, Picoides tridactylus: la nuova “perla” delle Alpi bresciane. YouTube




Aucun commentaire sur ce sujet
Participer à la discussion !