Une éclipse solaire est un phénomène rare qui se produit lorsque la Lune se place devant le Soleil, l’occultant totalement ou partiellement et projetant une ombre sur Terre. Elle a des effets divers sur le comportement de nombreux animaux diurnes, qui réduisent alors généralement leur activité, tandis que le contraire est noté pour les espèces crépusculaires (lire Les effets des éclipses solaires sur le comportement de certains oiseaux).

Les réactions des oiseaux ont été particulièrement observées, même si en raison de la rareté de ces événements célestes, les opportunités de les étudier sont peu nombreuses et les données collectées rares : lors d’une éclipse solaire en 2020, les observateurs avaient noté dans le centre de l’Éthiopie une forte diminution des cris, des chants, de la recherche de nourriture et des déplacements de l’avifaune. Lors de celle de 2007 aux États-Unis, certaines espèces avaient considérablement modifié leur activité vocale. En 1998, sur la côte nord du Venezuela, les oiseaux aquatiques, comme les pélicans, avaient arrêté de pêcher et avaient rejoint leurs dortoirs. Le 9 mars 2016, dans le centre de l’île de Sulawesi (Indonésie), les colonies avaient d’abord réduit leur activité de nourrissage, puis l’avaient totalement cessé.

Situation du Red Butte Canyon, dans l'Utah (États-Unis)

Situation du Red Butte Canyon, dans l’Utah (États-Unis).
Carte : Ornithomedia.com

Dans un article publié en 2023 sur la plateforme BioRxiv, des biologistes ont présenté les résultats de l’activité de captures d’oiseaux migrateurs dans la zone de recherches de Red Butte Canyon, située dans l’Utah, lors de l’éclipse solaire du 14 octobre 2023, qui avait traversé l’ouest des États-Unis, provoquant un obscurcissement de près de 87 %. En se basant sur les données collectées lors de onze années (de 2012 à 2023) sur ce site, ils ont constaté un surprenant pic en 2023, suggérant une inattendue augmentation du passage. Le nombre d’individus attrapés dans les filets ce jour-là a également dépassé la moyenne de 18 autres journées de baguage à la mi-octobre.

Le 14 octobre 2023, entre 7 h 30 et 13 h 30, 39 oiseaux appartenant à huit espèces ont été capturés, dépassant le précédent record de 30 oiseaux atteint le 20 octobre 2022. Les Juncos ardoisés (Junco hyemalis) étant les plus nombreux avec dix captures, suivis des Tohis tachetés (Pipilo maculatus) avec six captures, des Mésanges à tête noire (Poecile atricapillus) et des Grives solitaires (Catharus guttatus), avec cinq captures pour chacune de ces deux espèces. Le pic a été atteint à 10 h 30, et le rythme est redevenu normal entre 11 h30 et 12 h.

Alors que l’on constate généralement que les éclipses solaires provoquent une réduction de l’activité des oiseaux diurnes, celle du 14 octobre 2023 semble avoir au contraire entraîné une hausse du nombre de prises dans les filets, en particulier durant le moment de la plus forte obscurité. Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ce paradoxe apparent : la baisse soudaine de la luminosité pourrait avoir incité les oiseaux à chercher rapidement un endroit pour passer la « nuit » et/ou pourrait les avoir désorienté et paniqué.

L’activité vocale des oiseaux dans la zone de baguage a aussi fortement diminué durant cette éclipse partielle, même si à la mi-octobre, elle était déjà plutôt réduite.

Même si ces observations sont basées sur une seule journée et sur un nombre réduit d’oiseaux et ne concerne qu’un seul lieu, elles confirment les effets des éclipses sur le comportement de ces derniers, y compris durant les périodes de migration. Il serait intéressant de collecter des données de baguage durant l’éclipse du 8 avril 2024, qui se déroule durant le passage prénuptial.

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