Le Lagopède alpin (Lagopus muta) mesure de 32 à 40 cm de long. Chez les deux sexes, le bec est court et noir et les pattes et les doigts sont emplumés afin de faciliter les déplacements dans la neige. En hiver, il est presque tout blanc, à l’exception des lores et de la queue noirs. Au printemps, chez le mâle adulte, la tête, le cou et une partie du dos et des ailes deviennent brun-roux et des caroncules rouges proéminents se développent au-dessus des yeux. La femelle lui ressemble, mais le roux est remplacé par un gris-brun fortement marqué de noir, et elle ne possède pas de caroncules. En été et au début de l’automne, les parties rousses du plumage du mâle deviennent  grisâtres et des taches noires apparaissent sur son dos.
 
C’est une espèce sédentaire qui niche dans la toundra arctique et sur les versants montagneux parsemés de rochers au-dessus de la limite des arbres, de l’Écosse, de l’Islande et des Pyrénées à la Sibérie orientale et au Japon, en passant par les Alpes, la Scandinavie et l’Asie centrale (massifs du Pamir et de l’Altaï), ainsi qu’en Alaska et au Canada. Il a été introduit en Nouvelle-Zélande, en Géorgie du Sud (Grande-Bretagne) et aux îles Kerguelen et Crozet (France). Sa taxonomie est complexe et variable selon les auteurs : 23 sous-espèces ont été reconnues par l’International Ornithological Congress, dont L. m. japonica.

Situation du mont Kiso-Komagatake, dans les Alpes centrales japonaises

Situation du mont Kiso-Komagatake, dans les Alpes centrales japonaises. 
Carte : Ornithomedia.com 

Appelée localement « raichō », cette dernière est isolée et ne vit plus que dans une zone montagneuse à cheval sur les préfectures de Nagano, de Toyama, de Gifu et de Niigata, sur l’île de Honshu, au-dessus de 2 500 mètres d’altitude. Dans les années 1980, on estimait qu’il restait 3 000 individus, mais sa population actuelle serait tombée à environ 1 700 oiseaux, en raison des effets divers du réchauffement climatique, d’une pression prédatrice croissante de la part des martres, des renards et des corvidés et d’une dégradation de son habitat causée par le Cerf sika (Cervus nippon) et le Sanglier du Japon (Sus scrofa leucomystax).

La sous-espèce L. m. japonica est en voie d’extinction et est inscrite sur la la Liste rouge nationale. En 2012, le ministère de l’Environnement a lancé un vaste programme de conservation et de restauration de sa population dirigé par le professeur Nakamura Hiroshi, de l’université de Shinshū. Avec l’ornithologue Kobayashi Atsushi, ils ont mené des études dans les secteurs favorables à plus de 3 000 mètres d’altitude afin d’évaluer les taux de survie du lagopède nippon à chaque stade de son cycle de reproduction et de déterminer la meilleure façon d’orienter les efforts de protection. 

En juillet 2018, un alpiniste a découvert une femelle sur le mont Kiso-Komagatake, dans les Alpes centrales, qui culmine à 2 956 mètres d’altitude : or on pensait que la sous-espèce avait disparu de cette partie de ce secteur depuis les années 1970. Une analyse génétique a révélé que cet oiseau était probablement issu de la population relativement stable du mont Norikura, situé à 40 km au nord.

Un projet, baptisé « Opération Résurrection », visant à rétablir une population reproductrice d’environ cent oiseaux dans les monts Kiso, a été lancé en 2019 : les ornithologues ont commencé par remplacer les œufs non fécondés produits par la femelle « errante » par d’autres qui avaient été pondus par d’autres femelles sur le mont Norikura. L’année suivante, le même processus a été répété avec des œufs fécondés pondus par des femelles élevées en captivité. Toutes ces tentatives ont malheureusement échoué, les poussins nés dans la nature ayant été victimes des intempéries et des prédateurs.

En août 2020, 19 oiseaux, dont 16 poussins, ont été transférés depuis le mont Norikura, et les résultats obtenus ont été encourageants : en juillet 2021, dix couvées ont été trouvées, dont une pondue par la femelle découverte en 2018. Cinq d’entre elles ont été placées dans des enclos grillagés, et deux ont été transférées dans les zoos de Nasu (préfecture de Tochigi) et de Nagano (préfecture de Nagano) pour y être élevées en captivité puis relâchées. En septembre 2024, sept oiseaux nés en captivité dans le zoo d’Omachi (préfecture de Nagano) ont été libérés près du sommet du mont Kiso-Komagatake, et le 26 mars 2025, le Ministère nippon de l’Environnement a annoncé qu’une des femelles avait passé l’hiver et qu’elle se nourrissait de plantes en compagnie d’un mâle local : les ornithologues espèrent qu’un couple se formera et que des œufs seront pondus. Le professeur Hiroshi Nakamura a déclaré que cette nouvelle était encourageante et qu’elle constituait une étape importante dans la réussite de la restauration d’une population viable dans les Alpes centrales japonaises.  

En Europe, des projets de transferts de Lagopèdes alpins ont aussi été menés, et ils ont donné des résultats mitigés. Dans les Alpes, 16 oiseaux provenant de l’Alpenzoo d’Innsbruck (Autriche) ont été relâchés en 2002 et en 2003 sur le Monte Baldo, dans la province autonome de Trente (Italie), mais cela n’avait pas permis la constitution d’un noyau de population viable. Dans les Pyrénées, 35 individus ont été capturés entre 2008 et 2011 dans des populations « sources » en Cerdagne et en Andorre, équipés d’émetteurs, puis relâchés dans le massif Canigou-Puigmal, situé à l’extrémité orientale des Pyrénées, afin d’améliorer la diversité génétique de la population qui y survit. Cette opération avait abouti à la production d’au moins 23 jeunes en âge de se disperser.

Femelle de Lagopède alpin (Lagopus muta) de la sous-espèce japonica se nourrissant sur le mont Norikura, dans la préfecture de Nagano (Japon), en juillet 2013.
Source : Alpsdake

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