La mue chez les passereaux

Hirondelles rustiques (Hirundo rustica) juvéniles

Hirondelles rustiques (Hirundo rustica) juvéniles : la stratégie de mue de cette espèce est de type 4.
Photographie : Elisabeth Strouve

Les oiseaux passent par plusieurs types de plumage au cours de leur vie : ils sont d’abord dotés d’un duvet quand ils éclosent, puis ils acquièrent leur plumage juvénile, qui n’est conservé que quelques semaines ou quelques mois, même si certaines plumes (des ailes et de la queue) subsistent plus longtemps. Viennent ensuite, selon les espèces, un ou plusieurs plumages immatures, puis le plumage adulte définitif, qui est régulièrement renouvelé au cours de la vie de l’oiseau à l’occasion des mues (lire Comprendre la mue chez les oiseaux).

Il existe différentes stratégies de mue chez les passereaux :

  • le type 1 : le plumage juvénile (de la naissance à la fin de l’été) subit une mue (post-juvénile) complète à la fin de l’été, et l’adulte (âgé d’un an) une mue complète durant l’été qui suit sa naissance. C’est le cas en Europe des alouettes, des étourneaux,  des moineaux, du Bruant proyer (Emberiza calandra), de l’Orite (ou Mésange) à longue queue (Aegithalos caudatus), de la Panure à moustaches (Panurus biarmicus), de la Lusciniole à moustaches (Acrocephalus melanopogon), ou encore de la Cisticole des joncs (Cisticola juncidis).
  • Le type 2 : le juvénile subit une mue post-juvénile partielle à la fin de l’été, puis l’adulte une mue complète durant l’été de l’année qui suit sa naissance.
    Roitelet triple-bandeau (Regulus ignicapilla) juvénile

    Roitelet triple-bandeau (Regulus ignicapilla) juvénile à Aire-sur-l’Adour (Landes) le 20 juillet 2021. Son plumage est un peu différent de celui de l’adulte, mais on le reconnaît tout de même à ses sourcils blanchâtres, à son dos vert, à sa barre alaire blanche et à sa silhouette rondouillarde.
    Photographie : Alain Fourcade

     C’est le cas de nombreux passereaux des jardins, des campagnes et des forêts comme les accenteurs, les sittelles, les grimpereaux, les roitelets, les mésanges, les merles, les grives, les corbeaux, les corneilles, les fringilles (pinsons, verdier, linotte, etc.), le Roselin cramoisi (Carpodacus erythrinus) (la mue post-juvénile se déroule en hiver), du Rougegorge familier (Erithacus rubecula), des rossignols (Luscinia sp.), des rougequeues (Phoenicurus sp.), du Tarier pâtre (Saxicola rubicola), du Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes) ou du Bruant jaune. 
    La Rémiz penduline (Remiz pendulinus), le Traquet rieur (Oenanthe leucura), l’Hirondelle des rochers (Ptyonoprogne rupestris), le Jaseur boréal (Bombycilla garrulus), le Cincle plongeur (Cinclus cinclus) ou le Bruant fou (Emberiza cia) suivent aussi cette stratégie.

  • Le type 3 : le juvénile subit une mue partielle à la fin de l’été puis une mue partielle en hiver, tandis que l’adulte subit une mue complète durant l’été de l’année suivant sa naissance, suivie d’une mue prénuptiale partielle en hiver. C’est le cas de la Gorgebleue à miroir (Luscinia svecica), du Tarier des prés (Saxicola rubetra), des traquets (Oenanthe sp.) sauf le Traquet rieur (O. leucura), du Monticole de roche (Monticola saxatilis), de la Bouscarle de Cetti (Cettia cetti), des fauvettes (Sylvia  et Curruca sp.) sauf la Fauvette des jardins (C. borin), du Pouillot véloce (Phylloscopus collybita), des gobemouches (Ficedula sp. et Muscicapa sp.) sauf le Gobemouche gris (M. striata), du Tichodrome échelette (Tichodroma muraria), de la Pie-grièche grise (Lanius excubitor), et des bruants (sauf les Bruants proyer, jaune, fou et mélanocéphale).
  • Le type 4 : le juvénile subit une mue partielle à la fin de l’été puis une mue complète en hiver, et l’adulte une mue complète à la fin de l’été suivie d’une mue complète en hiver. C’est le cas des hirondelles (sauf de l’Hirondelle des rochers), de l’Agrobate roux (Cercotrichas galactotes), des locustelles (Locustella sp.), des rousserolles (Acrocephalus sp.), des hypolaïs (Hippolais sp.), des pouillots (Phylloscopus sp.) sauf le Pouillot véloce (P. collybita), du Gobemouche gris (Muscicapa striata), du Loriot d’Europe (Oriolus oriolus), des pies-grièches (Lanius sp.) sauf la Pie-grièche grise et du Bruant mélanocéphale (Emberiza melanocephala).

Un passereau avec une mue du type 2 : le Rougegorge familier

Voici ci-dessous quelques photos d’un Rougegorge familier à différents stades de sa mue post-juvénile.

Rougegorge familier (Erithacus rubecula) juvénile

Jeune Rougegorge familier (Erithacus rubecula) au début de sa mue post-juvénile partielle en Belgique en septembre 2016 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Marc Fasol

Rougegorge familier (Erithacus rubecula) juvénile

Jeune Rougegorge familier (Erithacus rubecula) au début de sa mue post-juvénile partielle en Belgique en septembre 2016 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Marc Fasol

Rougegorge familier (Erithacus rubecula) juvénile

Jeune Rougegorge familier (Erithacus rubecula) à un stade plus avancé de la mue post-juvénile partielle en Belgique en septembre 2016 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Marc Fasol

Rougegorge familier (Erithacus rubecula) juvénile

Jeune Rougegorge familier (Erithacus rubecula) à un stade plus avancé de la mue post-juvénile partielle en Belgique en septembre 2016 (cliquez sur la photo pour l’agrandir).
Photographie : Marc Fasol

Des problèmes d’identification pour certains passereaux

Verdier d'Europe (Carduelis chloris) juvénile

Verdier d’Europe (Chloris chloris) juvénile : les stries sur le ventre, qui sont absentes chez l’adulte, peuvent dérouter l’observateur. Notez en (1) les commissures à la base du bec qui sont typiques des très jeunes oiseaux. 
Photographie : Michel Freulon

Le problème d’identification des passereaux juvéniles ne concerne pas certaines espèces très reconnaissables comme les hirondelles, le Cincle plongeur (Cinclus cinclus), le Troglodyte mignon (Troglodytes troglodytes), les Pies bavardes (Pica pica), le Pic vert (Picus viridis) ou la Corneille noire (Corvus corone), dont la silhouette et/ou la répartition des couleurs sont semblables à celles des adultes (lire ). Il se pose surtout pour certains petits passereaux comme les alouettes, les bergeronnettes ou les fauvettes, voire pour des oiseaux bien connus de nos jardins comme le Rougegorge familier ou le Merle noir (Turdus merula), dont les plumages juvéniles striés ou tachetés peuvent dérouter l’observateur inexpérimenté.

La technique indirecte

La façon la plus simple pour identifier un passereau juvénile est certainement d’attendre qu’un adulte vienne le nourrir (sauf bien sûr dans le cas des espèces parasites comme les coucous et les coucous-geais en Europe ou les vachers en Amérique du Nord). Mais quand le jeune grandit, les parents cessent progressivement de le nourrir et on peut alors attendre des heures que l’oiseau mystère soit ravitaillé…

Les critères utiles pour identifier les passereaux juvéniles

  • La forme du bec est généralement comparable à celle de l’adulte, même si des bourrelets blanchâtres ou jaunâtres au niveau des commissures sont visibles.
  • Les jeunes oiseaux ont pratiquement la même taille que celle des adultes, et elle constitue donc un critère utile.
  • Les proportions et le comportement peuvent aider, tout comme la couleur des pattes et leur forme.
  • La répartition générale des couleurs (zones plus sombres ou plus claires sur le ventre et sur le dessus, etc.) peut rappeler celle des adultes.
  • Les couleurs des ailes et de la queue du juvénile sont généralement similaires à celles des adultes. Par exemple, les zones colorées jaunes et noire typiques du Chardonneret élégant (Carduelis carduelis) sont déjà visibles chez le jeune oiseau (voir ci-dessous).
  • Les appels de mendicité sont distincts d’une espèce à l’autre, mais il faut les connaître ou avoir une certaine expérience, et surtout ces cris sont différents de ceux des adultes.
  • L’habitat et l’aire de répartition, forcément typiques de l’espèce en période de reproduction car le juvénile s’éloigne généralement de son nid, sont aussi à prendre en compte. 
Rougegorges familiers (Erithacus rubecula)

Rougegorges familiers (Erithacus rubecula) adulte et juvénile : leurs plumages sont très différents, mais les plumes de l’aile, en particulier les rémiges tertiaires (1), secondaires (2), primaires (3) et les rectrices de la queue (4) sont de la même couleur. Toutefois, pour cette espèce, ces plumes n’ont pas de dessin frappant (absence de barre alaire).
Photographie : Juan Emilio / Wikipedia

Rougequeue noir (Phoenicurus ochruros) juvénile

Rougequeue noir (Phoenicurus ochruros) juvénile : le plumage du corps est gris légèrement écailleux, alors que celui de l’adulte est plus uni et plus sombre, mais les rectrices sont déjà rousses.
Photographie : Alain Fossé / Digimages.info

Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio) juvénile

Pie-grièche écorcheur (Lanius collurio) juvénile recueillie : ses barres sur les flancs et ses écailles du dessus peuvent dérouter l’observateur, mais sa silhouette, sa taille, la forme de son bec, la répartition générale des couleurs (brunâtre dessus, blanchâtre dessous, zone auriculaire sombre) peuvent aider à l’identifier.
Photographie : Claire Lair-Moreau

Chardonneret élégant (Carduelis carduelis) juvénile

Chardonneret élégant (Carduelis carduelis) juvénile : les dessins de l’aile et la queue (ici plutôt abîmée) constituent d’utiles indices pour l’identifier.
Photographie : Frédéric Courty

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